Se targuant d’être “audacieux et courageux”, les libéraux ont présenté leur budget 2010 le 30 mars dernier. Considérant que 74% de la population est contre le budget et dans un contexte où 70% de la population est insatisfaite de Jean Charest, on peut se demander si ce budget n’est pas plutôt arrogant et suicidaire. Heureusement que les gens d’affaires sont là pour réconforter le gouvernement.
Voici un bref résumé des mesures :
La mise en œuvre de la Politique de financement des services publics (la TVQ passera ainsi de 7,5 % aujourd’hui, à 8,5 % en janvier 2010, et à 9,5 % en janvier 2012) ;
Une hausse de la taxe sur le carburant ;
L’imposition d’une redevance sur l’eau utilisée comme intrant ou dans les processus de production ;
En santé, une contribution par adulte de 25 $ en 2010, de 100 $ en 2011 et de 200 $ en 2012 et imposition d’un ticket modérateur ;
Une augmentation progressive, dès 2014, du prix de l’électricité provenant du bloc patrimonial d’Hydro-Québec et le versement de ces revenus supplémentaires au Fonds des générations (le gouvernement libéral entend augmenter le prix de l’électricité de 3,7 % par an entre 2014 et 2018, pour atteindre 1 ¢ de plus par kilowattheure) ;
Une augmentation des frais de scolarité universitaire à l’automne 2012 et la convocation d’une rencontre des partenaires de l’éducation pour déterminer les modalités de cette hausse et échanger sur la performance du réseau universitaire et son financement.
L’ASSÉ a évidemment fortement réagit à toutes ces mesures. Pour l’ASSÉ, il est hors de question de participer à une rencontre des partenaires de l’éducation dont les conclusions sont déjà orientées vers une hausse des frais de scolarité. Du côté des fédérations étudiantes, on “doute” de plus en plus de la pertinence d’un tel exercice sur ces bases.
Membre très active de la coalition contre la hausse des tarifs et de la privatisation des services publics, l’ASSÉ a participé massivement à la manifestation contre les hausses de tarifs organisée par la coalition le 1er avril, 2 jours après le budget. Plusieurs milliers de personnes (12 000, officiellement) issues d’une centaine d’organismes sociaux sont descendues dans la rue pour protester contre le budget. Pour l’occasion, plus de 40 000 étudiant-es étaient en grève sur l’appel de l’ASSÉ.
Couplé à cette réplique immédiate de la rue, plusieurs groupes Facebook de plusieurs milliers de personnes se sont spontanément créés pour protester contre les hausses de tarifs budgétaires. Une blogueuse pigiste du bien connu site Branchez-Vous lançait la réflexion sur le fait que les réseaux sociaux sur le web semblaient plus disperser que rassembler.
Qu’à cela ne tienne, un de ses groupes, les “cols rouges”, a démarré une campagne de mobilisation massive via Facebook et via la radio-poubelle de Québec 93,3. Cette réplique de Red neck au budget prouve bien que ce n’est pas seulement la gauche qui se mobilise contre le budget. Se réclamant de la “majorité silencieuse” et dans la rue à Québec le 11 avril dernier en arborant le symbole du balai pour “faire le ménage”, les organisateurs ont soutenu que 50 000 personnes sont descendues dans la rue pour protester. Chez la plupart des manifestant-es, on réclame plus de coupures de l’État et une meilleure gestion des fonds publics. Ce billet trouvé sur le blogue Pour un monde à droite éclaire un peu sur l’intégration de la gauche à ce mouvement…
Comme seule réponse, les libéraux ont soutenu “comprendre les réactions” mais ont soutenu que leur budget est réaliste considérant la conjoncture. Suite à leur Conseil général de la fin de semaine du 17-18 avril, Jean Charest a toutefois reconnu que la contribution santé est inéquitable. Sa façon de revenir sur sa décision budgétaire est d’insérer un élément progressiste dans la contribution en fonction des revenus…
Le Conseil général a également été l’occasion pour les libéraux de voter la destruction finale du système d’éducation québécois au profit d’un désir “de se hisser dans le peloton de tête des économies du savoir". Les délégué-es ont notamment débattu de la pertinence d’instaurer des « Écoles-Usines » et d’octroyer des prêts et bourses en fonction des besoins d’emplois dans des secteurs économiques particuliers. La cerise sur le sundae a été l’adoption en 15 minutes d’instaurer des frais de scolarité différenciés au niveau universitaire et de les hausser à la moyenne canadienne. La réplique de l’ASSÉ a été immédiate : c’est plutôt par la gratuité scolaire et une amélioration du système de prêts et bourses que la société québécoise aura une éducation véritablement de qualité et accessible pour toutes les classes sociales. Les autres organisations étudiantes nationales ont également rejeté ces mesures.
Lors du prochain congrès de l’ASSÉ le 8 et 9 mai prochain au Cégep de Saint-Laurent, ce sera l’occasion d’organiser collectivement une riposte adéquate à cette attaque sans précédent.
Anne-Marie Provost, pour le Conseil exécutif de l’ASSÉ.