Tél: (514) 390-0110 • Fax: (514) 390-8415 • Web:
2570 rue Nicolet, bureau 301, Montréal (QC), H1W 2L5
Articles Féministes de l’Ultimatum
Historique


Les luttes des femmes

Automne 2001, VOL 1, NO 1
Comité Femmes de l’ASSÉ

Il est courant d’entendre que le XXIe siècle sera celui des femmes ; qu’avec tous les gains que celles-ci ont obtenus dans les dernières décennies, tant au niveau du droit de vote que de l’accès à l’éducation ou au marché du travail, il ne peut en aller autrement. Mais un grand gain reste encore à faire, celui de l’égalité complète et reconnue entre l’homme et la femme... Ce dernier gain n’en est pas un des plus évidents, il est plutôt la finalité de toutes les luttes féministes. Pour en arriver à tout changement social - élimination du patriarcat comprise - il doit s’opérer a priori un changement de mentalité. Le langage employé ainsi que la visibilité et la présence des femmes sont, en autres, des facteurs qui peuvent réussir à amorcer ce changement de mentalité , mentalité que nous est imposée à tous et à toutes du fait que nous évoluons dans une société profondément patriarcale.

Nous pouvons constater que le langage influence la pensée : il est pour nous très difficile, voire impossible, de songer à des concepts qui ne s’expriment pas par le langage. Comment pourrait-on songer à des concepts tels que le Bien et le Mal si on ne pouvait les exprimer ? C’est en considérant cela qu’une des luttes les plus actuelles des femmes s’est amorcée, soit la lutte pour la féminisation. En 1979, des femmes françaises, soutenues par un groupe féministe de l’époque, Les Ménagères, commencèrent à réclamer la féminisation des titres de professions et de métiers. Et ce n’est que depuis 1986 que cette féminisation est reconnue en France ! Féminiser, c’est parler des hommes ET des femmes qui composent la société ; c’est parler des étudiantes ET des étudiantes, parce que nous sommes bel et bien des étudiantes et non des étudiants. Féminiser, c’est saisir que les femmes sont une composante importante de la société, qu’elles sont une composante aussi importante que les hommes. Féminiser est un moyen de pression contre l’ensemble de la société patriarcale dans laquelle nous vivons. Dans le contexte actuel, où il est encore difficile pour une femme de s’exprimer en public avec crédibilité, féminiser signifie qu’on accorde à la femme le même statut qu’à l’homme, qu’on la sait capable d’autant de choses. Pourtant, quand le débat sur la féminisation refait surface, plusieurs se plaignent : les textes féminisés sont trop longs, sont trop lourds... et en plus, ça ne donne rien ! La féminisation oblige à un effort grammatical qui en dérange plusieurs, mais derrière ce petit effort se cache une réflexion beaucoup plus profonde, le fameux processus beaucoup plus complexe d’un changement de mentalité collective. La féminisation est un moyen de contestation contre la société patriarcale, elle est une réappropriation de la langue par les femmes. Il faut bien comprendre que la féminisation ne peut qu’avoir un effet à moyen et long termes. En effet, ce n’est pas d’admettre qu’il y a des femmes ingénieures qui fait qu’il y a immédiatement autant de femmes ingénieures que d’hommes ingénieurs. Mais à plus long terme, le fait de féminiser ajoute au potentiel de la condition féminine. La langue a longtemps été la propriété des hommes, on n’a qu’à prendre leur représentation à l’Académie française ; de 1635 à 1980, aucune femme n’y siégeait et même aujourd’hui on n’en compte qu’une seule sur les quarante (40) membres. Ce qui nous amène nous amène à parler d’une autre lutte menée par les femmes, surtout lorsqu’il est question de politique, la parité. La parité est la représentativité adéquate des différents groupes dans une instance, selon la proportion d’individu-e-s qu’ils représentent dans la société. Pendant bien longtemps, les femmes d’Amérique du Nord ont été représentées de façon plus équitable (quoique totalement injuste) car elles bénéficiaient du droit des minorités à être représentées dans toutes les instances. Cette mesure, fondamentalement insuffisante, a tout de même aidé à accroître le rapport de force des femmes. Malgré qu’elle ait peut-être aidé la lutte, cette mesure était inacceptable car elle véhiculait un phénomène d’exclusion sociale liée au statut de minorité. Les femmes sont loin d’être une minorité, elles représentent un peu plus de 50% de la population mondiale ! C’est pourquoi les femmes préfèrent maintenant luter pour la parité, celle-ci pouvant leur permettre d’avoir une représentativité équivalente à celle des hommes. Il est primordial, pour en arriver à ce que les droits des femmes soient autant reconnus que ceux des hommes, que les femmes puissent avoir une représentativité équivalente au sein de toutes les instances. Mais la notion de représentativité adéquate n’est pas la finalité de la lutte pour la parité, elle n’est qu’un moyen. Le but ultime de cette lutte n’est pas simplement une représentativité équivalente au sein des instances décisionnelles, mais bien une représentation adéquate des femmes dans toutes les sphères de la société. Au niveau du travail, ceci pourrait se traduire par un nombre comparable de femmes et d’hommes à titre d’employés et d’employées, de cadres, d’administratrices et d’administrateurs... Mais la société, telle qu’elle fonctionne actuellement, n’est pas prête à cela. Les femmes vivant des situations différentes de celles des hommes et ayant des besoins différents, tout le fonctionnement de la société est remis en cause et doit être changé ; d’où la nécessité d’avoir autant de femmes que d’hommes au sein de toutes instances décisionnelles.

Une question a maintes fois refait surface : les luttes féministes ont-elles réellement leurs places en Éducation ? On sait que le système d’éducation est financé par l’État, on sait aussi que les réformes qu’il subit sont une initiative de l’État ; bref, on sait que l’Éducation est régie par l’État. On ne peut pas dissocier les réalités en Éducation de celles de la société. Le système d’éducation contribue grandement à former les citoyens et citoyennes. Il véhicule certaines valeurs et en écarte certaines autres. De par son fonctionnement, il privilégie certaines personnes, certaines classes, certains groupes et en défavorise d’autres. Les problématiques à l’intérieur de la société se retrouvent inévitablement dans toutes les sphères qui la composent, l’Éducation y compris. Les luttes féministes, comme toutes les autres luttes progressistes, ont donc beaucoup à faire dans le mouvement étudiant. C’est pourquoi l’ASSÉ a voulu accorder une place importante aux luttes des femmes, par la création du Comité femmes. Ce comité a pour objectif de promouvoir la lutte pour la condition des femmes en Éducation comme dans la société et ce, au sein de toutes les instances de l’ASSÉ. Aussi, ce comité se propose pour aider à la création de Comités femmes dans les institutions scolaires et représenter un centre de ressources pour aider les étudiantes. Il permet aux étudiantes de se réunir entre elles pour discuter des enjeux qui les concernent directement. Lors du dernier congrès de l’ASSÉ, le Comité s’est particulièrement penché sur les questions de la féminisation et de la parité. Il fut par la suite adoptée par le Congrès une féminisation complète des noms et l’emploi des tirets pour la féminisation des adjectifs et des pronoms. Le Comité a aussi demandé un droit de vote au Congrès, mais cette demande ne sera traitée que lors du congrès d’automne. Pour favoriser la parité au sein de toutes les instances de l’ASSÉ - l’ASSÉ a déjà une position voulant privilégier la parité au sein du Conseil exécutif - le Comité a demandé à ce que les délégations (composées de trois (3) personnes par association étudiante locale) présentes au Congrès soient composées d’au moins une femme, la représentation de 50% étant difficile dans ce cas... Cette proposition sera aussi traitée lors du prochain congrès, à la fin du mois de septembre.

Les femmes, à travers leurs nombreuses luttes, ont obtenu d’importants gains. Mais on n’en est pas pour autant arrivé à nos fins. Il est important de réaliser que, malgré l’idée générale que les femmes ont acquis un statut égal à celui des hommes, plusieurs luttes sont encore à mener. Il suffit de penser aux cas d’iniquités salariales qui composent plus la règle que l’exception ou à l’image de la femme qui n’a que pour seul atout ses belles fesses ainsi qu’aux nombreux autres exemples de discrimination faite envers les femmes pour être convaincu-e-s que le combat n’est pas terminé. CE N’EST QU’UN DÉBUT, CONTINUONS LE COMBAT !!!

Sources :  [1]]


La langue macho

Automne 2001, VOL 1, NO 1
Comité Femmes de l’ASSÉ

Les groupes engagés se heurtent très souvent à des problèmes internes de domination interpersonnelles. Si nous voulons travailler efficacement à un changement social, il nous faut nous pencher sur notre propre comportement. Plus souvent qu’autrement, ce sont les hommes qui, même minoritaires, dominent les activités des groupes mixtes. On peut presque parler d’un "pattern masculin de comportement" ; non parce qu’il n’arrive jamais qu’une femme s’exprime de cette façon, mais parce que ce sont généralement les hommes qui ont le privilège d’agir impunément de la sorte. et ces comportements ont pour effet d’entretenir ce privilège, en aliénant celles et ceux qui recherchent des échanges plus harmonieux, égalitaires et efficaces.

Certaines personnes ont déjà commencé à identifier leurs patterns de pouvoir et à assumer la responsabilité de s’en défaire. Voici une liste des comportements qu’elles cherchent à changer en elles et autour d’elles : les caractéristiques de la "langue macho"... commençons par arriver à l’entendre, autour de nous et dans nos propres interventions.
- Jouer au "solutionneur" de problèmes : être toujours celui ou celle qui donne la réponse ou la "solution" avant que les autres n’aient eu quelque opportunité de contribuer à l’échange ;
- Monopoliser le crachoir : parler trop souvent, trop longtemps et trop fort ;
- Parler en "majuscules" : présenter ses opinions et ses solutions comme le point final sur tout sujet, attitude renforcée par le ton de la voix et l’attitude physique ;
- Adopter une attitude défensive : répondre à toute opinion contraire à la sienne comme s’il s’agissait d’une attaque personnelle ;
- Couper les cheveux en quatre : soulever chaque imperfection des interventions des autres et une exception à chaque généralité énoncée ;
- Diriger la scène : prendre continuellement la responsabilité des tâches clés avant que les autres n’aient la chance de se porter volontaires ;
- Reformuler : reprendre en ses propres mots ce qu’une personne (le plus souvent une femme)) vient de dire de façon parfaitement claire. Embarquer sur la conclusion pour la récupérer à ses propres fins (phénomènes du "recouvrement").
- Chercher les feux de la rampes : se servir sortes de stratagèmes, de mises en scène, pour attirer un maximum d’attention sur soi, ses idées ;
- Rabaisser : commencer ses phrases avec des tournures telles : "Auparavant je croyais cela, mais maintenant..." ou "Comment peux-tu arriver à dire que..." ;
- Parler pour les autres : faire de ses opinions la voix d’une collectivité pour leur donner plus de poids : " Beaucoup d’entres nous pensons que..." Interpréter à ses fins ce que disent les autres : Ce qu’elle veut dire en fait, c’est que..." ;
- Faire du "forcing" : imposer comme seuls valables la tâche et le contenu, en éloignant le groupe de l’éducation de chacun et chacune, ainsi que d’une attention au processus de travail collectif et à la forme des productions ;
- Déplacer la question : ramener le sujet de la discussion à quelques thèmes que l’on maîtrise, de façon à briller en donnant libre cours à ses dadas ;
- Faire preuve de négativisme : trouver quelque chose d’incorrect ou de problématique à tout sujet ou projet abordé ;
- N’écouter que soi : formuler mentalement une réponse dès les premières phrases de la personne qui parle, ne plus écouter à partir de ce moment et prendre la parole à la première occasion ;
- Être intransigeant et dogmatique : affirmer une position finale et indiscutable, même à propos de sujets mineurs ;
- Jouer à la hiérarchie : s’accrocher à des positions de pouvoir formelles et leur donner plus d’importance qu’il faut ;
- Éviter toute émotion : intellectualiser, blaguer ou opposer une résistance passive lorsque vient le temps d’échanger des sentiments personnels ;
- Être condescendant et paternaliste : infantiliser les femmes et les nouveaux et nouvelles arrivant-e-s. Phrase typique : "Maintenant, est-ce qu’une femme a quelque chose à rajouter ?" ;
- Draguer : traiter les femmes avec séduction, se servir de la sexualité pour les manipuler, en utilisant l’"humour" ambigu, le pro-féminisme de façade ;
- Jouer au coq : aller chercher l’attention et le soutien des femmes en faisant preuve de compétition entre hommes face à elles ;
- Souffrir d’estudiantite aiguë : concentrer jalousement les informations clés du groupe entre ses mains pour son propre usage et profit ;
- Ces comportements-là affaiblissent grandement la pleine richesse des connaissances et des aptitudes que pourraient se donner le groupe. Les femmes et les hommes qui ont moins d’assurance que les autres, surtout face à un climat de compétition se voient en effet exclu de l’échange d’expériences et d’idées ;
- Si l’on ne met pas fin au sexisme à l’intérieur des groupes qui visent un changement social il ne pourra y avoir de mouvement pour un véritable changement. Non seulement le mouvement s’enlisera-t-il dans des divisions, mais on arrivera même pas à envisager clairement une libération des rapports d,oppression imposer aux femmes. Tout changement de société demeure incomplet s’il n’inclut pas une émancipation face aux structures qui reproduisent ces rapports d’oppression ;
- Voici quelques façons concrète de prendre enfin nos responsabilités pour sortir de la "langue macho" ;
- N’interrompre personne : on a remarqué qu’en groupe mixte près de 100% des interruptions étaient le fait des gars. Un bon exercice à tenter : se donner une pause de quelques secondes entre chaque intervenante ;
- Offrir une bonne écoute : il est aussi important de bien écouter que de bien parler. Autrement, autant parler tout-e seul-e chez soi... Bien écouter ne signifie pas qu’il faille se retirer lorsque l,on ne parle pas. Au contraire, écouter attentivement est aussi une forme de participation ;
- Recevoir et donner du soutien : l’entraide est essentielle dans un groupe où certaines personnes cherchent à reconnaître et à mettre fin à leurs "patterns de contrôle des autres". Chacun-e des membres du groupe doit prendre ses responsabilités en ce sens, afin d’éviter que ce ne soit toujours le rôle des femmes. Cette prise en charge permettra aussi aux femmes de sortir de leur rôle traditionnel qui les forces généralement à prendre soin des besoin des hommes en ignorant les leurs ;
- Cesser de parler en réponses/solutions : on peut communiquer ses opinions et ses idées de façon convaincue, mais non compétitive face à celles des autres. On n’est pas obliger de parler de tous les sujets, ni d’exprimer chacune des idées qui nous viennent, surtout en grand groupe ;
- Ne rabaisser personne : apprendre à se surveiller pour s’arrêter au moment où on s’apprête à attaquer quelqu’un-e. Se demander, par exemple, "Qu’est-ce que je ressens exactement ? Pourquoi est-ce que je ferais cela ? De quoi ai-je vraiment besoin ? Qu’est-ce qui profitera le mieux au groupe ?" ;
- Relaxer : le groupe peut très bien se passer de nos petites attaques d’anxiété. il s’en portera d’autant mieux ;
- Interrompre les "patterns d’oppression" : il apparaît à chacun-e de nous de prendre dès maintenant d’interrompre, chez un-e collègue ou un-e ami-e, un comportement d’oppression qui nuit aux autres et qui paralyse le propre développement de cette personne. Ce n’est pas de l’amitié que de permettre à qui que ce soit de dominer ceux et celles qui l’entourent Apprenons à ajouter un peu de franchise et d’exigence à nos rapports d’amitié ;

Sources : [2]


Pendant que les compagnies en profitent

Hiver 2002, VOL 2, NO 1
Comité Femmes de l’ASSÉ

Rares sont les personnes qui en entendant le mot menstruation n’ont pas une image de saleté, d’impureté voire même de dégoût. Le seul moment où l’on aborde ce sujet, c’est lorsque vient le temps des éternelles farces de mauvais goût sur les femmes et leur syndrome prémenstruel. De nos jours, les femmes ne sont plus physiquement mises à l’écart mais par ce dédain généralisé, nous sommes carrément poussées à cacher cette manifestation naturelle du corps de la femme, faire comme si les menstruations, sous prétexte qu’elles ne sont pas bleu popsicle comme le liquide des annonces publicitaires , sont indignes d’attention. Pour nous aider à rendre nos règles quasi invisibles, Proctor & Gamble (qui détient 55% du marché et qui est responsable de la mort de plusieurs femmes des suites du syndrome de choc toxique) et Kimberly-Clark, rivalisent d’ingéniosité pour commercialiser des produits menstruels toujours plus petits et plus efficaces. En ce qui concerne le prix des produits menstruels, on estime qu’une femme utilise approximativement 215 tampons et/ou serviettes hygiéniques par année durant 30 ans. Considérant ces moyennes, c’est entre 2 400 et 3 000 $ par année que nous donnons aux compagnies pour qu’elles soient dans nos culottes ! Parce que ces produits ne sont pas stérilisés, les gouvernements considèrent que ce sont des produits de luxe et ajoutent une taxe d’achat au prix de vente lui-même imposant ; en effet, et malgré ce que l’on veut bien nous faire croire, "plus blanc que blanc" ne veut pas nécessairement dire parfaitement propre, et comme aucun gouvernement n’a encore légiféré à ce sujet, les compagnies ont carte blanche pour mettre en tablette des produits susceptibles de nuire à la santé de leur utilisatrices.

Pire encore, les produits d’hygiène féminine commerciaux contiennent des traces de dioxine. Ce composé organochlorique est hautement toxique pour l’être humain. La dioxine profite de la très haute capacité d’absorption de la paroi vaginale en période menstruelle pour s’incruster dans les tissus adipeux de notre organisme et ne plus jamais en sortir. Les organochlorés sont en relation directe avec l’augmentation des risques de cancer du sein, de cancer du col de l’utérus, d’endométriose, d’infections vaginales chroniques (parce que la Super Absorption des tampons déséquilibre le pH naturel du vagin en absorbant près de 90% des sécrétions autres que le sang), d’affaiblissement du système immunitaire, de maux de tête fréquents et même de malformations congénitales. Pour se débarrasser de tous les problèmes de santé reliés à leurs produits, les compagnies rejettent le blâme du syndrome du choc toxique (SCT), non pas sur la composition de leur produit, mais sur la mauvaise utilisation que nous en faisons ! En réalité, le développement de la bactérie responsable du SCT (le Staphylococcus aureaus) est possible grâce aux composés synthétiques (comme la rayonne) utilisés pour rendre l’absorption toujours plus absorbante ! La bactérie libère une toxine dans le sang de laquelle résulte de la fièvre, une réaction cutanée ainsi que des étourdissements. Aux États-Unis, depuis les années 80, 50 femmes sont mortes du SCT et plus de 1 000 ont été touchées par la maladie. 50 femmes tuées parce qu’elles étaient menstruées méritent qu’on réfléchissent un peu à ce que l’on porte pour, paradoxalement, nous protéger !

Bien que le marché de l’hygiène féminine aille bon train, il existe des moyens alternatifs naturels pour les menstruations. L’éponge de mer naturelle est une des alternatives les plus utilisées. D’une durée de vie de 3 à 6 mois, elle ne contient aucune fibre synthétique ou organochlorique. Il existe aussi des tampons fait de coton naturel. Ils sont tous les deux disponibles dans la plupart des magasins d’aliments naturels.

Le keeper est une coupe menstruelle ré-utilisable en caoutchouc naturel. Porté à l’intérieur du vagin, il tient en place par une légère succion contre les parois vaginales. Il suffit de briser cette succion pour le retirer et le rincer. D’une durée de vie de 10 ans il est écologique, pratique et vraiment économique ! Il est aussi possible d’utiliser des serviettes de coton réutilisables qui sont conçues et distribuées entre autres par le groupe Blood Sisters, groupe qui distribue aussi le Keeper. En tant que femme, il est important de savoir ce que les grandes compagnies font lorsqu’elles sont en contact avec nos vagins. Prendre le contrôle de nos corps inclus prendre contrôle de nos menstruations ; informez-vous, il existe des moyens alternatifs pour nous toutes !

Sources :  [3]


Bibliographie féministe (non-exhaustive)

Hiver 2002, VOL 2, NO 1
Comité Femmes de l’ASSÉ

OUVRAGES DE RÉFÉRENCE À CARACTÈRE HISTORIQUE 1. Le Collectif clio, L’histoire des femmes au Québec, depuis quatre siècles (moins avancé-e-s) ; 2. Bettina Bradbury, Familles ouvrières à Montréal Âge, genre et survie quotidienne pendant la phase d’industrialisation (moins avancé-e-s) ; 3. Barbara Ehrenreich et Deirdre English, Sorcière, sages-femmes et infirmières. Une histoire des femmes et de la médecine (moins avancé-e-s). Faible au niveau de l’analyse mais très bien documenté ; 4. Sheila Rowbotham, Féminisme et révolution (plus avancé-e-s).

OUVRAGES D’ANALYSES FÉMINISTES 1. Évelyne Tardy, "Regard critique de militantes sur des organisations syndicales et politiques"dans Prendre sa place ! Les femmes dans l’univers organisationnel (moins avancé-e-s) ; 2. Benoîte Groulx, Cette mâle assurance (moins avancé-e-s) ; 3. Paola Tabet, La construction sociale de l’inégalité des sexes. Des outils et des corps (plus avancé-e-s) ; 4. Colette Guillaumin, "Pratique du pouvoir et idée de Nature. L’appropriation des femmes" dans Questions féministes (plus avancé-e-s, ESSENTIEL).


Le féminisme de façade

Février 2003, VOL 2, NO 3
Comité Femmes

On retrouve dans presque toutes les plates-formes des organismes de lutte quelques principes féministes parmi une longue liste d’épicerie. Cependant, en observant la place qu’occupe actuellement la lutte contre le patriarcat, on se demande s’il y a une volonté réelle de faire de la lutte féministe un dossier prioritaire. Cette attitude qu’adoptent plusieurs organisations se nomme le féminisme de façade.

L’adoption d’une analyse théorique féministe transmet l’illusion que l’oppression des femmes est terminée et permet aux mêmes personnes de conserver leur pouvoir au sein des organisations dites progressistes. En tant que militants et militantes, nous devons nous assurer de ne pas se simplifier la vie en adoptant une analyse féministe strictement théorique. Il est dans le devoir de chaque personne et de chaque organisation de se demander la manière dont elle peut mettre sa théorie en pratique, car l’abolition du patriarcat ne se fera pas dans des procès-verbaux ou des articles de journaux.

Lorsque l’on tente de mettre en pratique l’analyse féministe et de prendre le temps de se questionner sur le patriarcat dans nos milieux, il arrive souvent que la question soit passée très rapidement au nom de la productivité. Pour les militantes féministes en région, elles se font parfois traiter d’animaux bizarres lorsqu’elles parlent de féminisme. Une chose est claire, c’est que plusieurs femmes ressentent encore de l’oppression lorsqu’elles tentent de parler du patriarcat et ce même dans des organisations militantes. Au nom de la productivité, on laisse de côté l’analyse féministe, pour organiser une manifestation, une conférence, un texte, ou encore, faire un tract. Cependant, l’organisation de ces activités qui visent souvent l’atteinte de petites réformes, ne réglera pas la racine d’une majeure partie des problèmes de notre société, la domination patriarcale. Chaque fois qu’on laisse de côté la question féministe pour travailler sur un autre dossier dit prioritaire, il est important de se questionner sur la pertinence et les conséquences de notre geste.

Collectivement nous devons nous demander le rôle que nous jouons dans la reproduction du patriarcat, en se posant des questions sur : les rapports de séduction que nous entretenons, la domination que nous exerçons sur les autres lors de nos discussions et les moyens concrets que nous prenons pour vaincre le patriarcat. La lutte contre le patriarcat nous concerne tous et toutes et nous devons le dénoncer concrètement et ne pas reproduire le féminisme de façade !

Le féminisme : Être féministe, c’est d’abord prendre conscience des rapports d’oppression des hommes sur les femmes (le patriarcat), donc se reconnaître comme opprimée pour pouvoir lutter. C’est aussi reconnaître l’oppression dans la sphère privée et lutter au quotidien contre le patriarcat.


Féministes et ASSÉ

Printemps 2003, VOL 2, NO 4
Julie Descheneaux, étudiante au baccalauréat en sociologie (UQÀM)

L’ASSÉ donne une place bien particulière aux femmes et aux féministes. Certes, ses principes de base énoncent un soutien à l’ensemble des luttes progressistes, mais elle doit faire davantage que de seulement appuyer la cause. En fait, le rôle du comité femmes de l’ASSÉ ne se limite pas à celui d’un comité de travail. Il existe a priori parce qu’il entre parfaitement dans le cadre du but premier de l’ASSÉ, soit de promouvoir les intérêts des étudiantes et des étudiants ou, plus particulièrement, de les défendre. Pour ce faire, il faut inévitablement lutter contre le système capitaliste puisqu’il est un obstacle majeur qui embourbe la population étudiante dans son aliénation. Privatisation du système, plans de réussite, rationalisation et autres sont des exemples de son application concrète et contre lesquels l’ASSÉ se bat. Or, il ne faut pas oublier qu’une autre forme de domination empêche la population étudiante d’avoir accès à une éducation gratuite et de qualité : le patriarcat. C’est plus de 50% des gens qui subissent cette oppression et que l’on oublie en limitant sa lutte au capitalisme.Le régime des prêts et bourses inadapté à la réalité des femmes, l’accessibilité réduite aux femmes-mères et l’exclusion des femmes qui sont dans des programmes traditionnellement masculins sont autant d’exemples qui viennent appuyer l’idée d’un comité femmes au sein de l’ASSÉ. Mais son rôle n’est pas seulement de se battre contre ces situations bien circonstancielles puisque le patriarcat est un système social, un mode de vie global.

La société conditionne les femmes et les hommes selon des modèles précis, ce qui se traduit entre autres par des choix de domaines d’étude plus ou moins différents : la science politique, l’informatique, la mécanique sont surtout réservées aux hommes ; les techniques infirmières, le service de garde, la coiffure sont des secteurs presque exclusivement féminins. Confinées dans un rôle social dominé par les hommes, les femmes doivent se libérer du système patriarcal si elles veulent être libérées. Par exemple, les valeurs généralement attribuées au genre masculin ne doivent pas être valorisées davantage que celles des femmes. Ainsi, on pourrait entre autres avoir comme résultat de réduire, voire d’éliminer, la division sexuée du travail et par le fait même, les inégalités salariales et la pauvreté accrue des femmes.

Par conséquent, l’ASSÉ doit plus que simplement porter une attention particulière à la cause féministe. Cette dernière doit être partie intégrante de ses revendications si elle veut défendre la cause étudiante et citoyenne puisque des gains au niveau de l’éducation seulement n’abolissent pas l’écart entre les étudiants et les étudiantes. En fait, ces dernières sont " désavantagées ", comparativement à leurs homologues masculins.


Le féminisme : où se situe le combat aujourd’hui

Janvier 2004, VOL 3, NO 3
Julie Lachance, étudiante en sciences sociales à l’Université Laval

Avec les attaques masculinistes dont les femmes et, surtout, les féministes, sont victimes depuis quelques temps, il semble y avoir la nécessité de rappeler la pertinence, encore aujourd’hui, de mener un combat féministe radical qui s’attaque à la société patriarcale et capitaliste dans laquelle nous vivons. L’analyse féministe radicale est encore incomprise et critiquée, mais elle ne s’est pas laissée aveugler par les gains antérieurement obtenus par les femmes et a poussé plus loin la compréhension des inégalités entre les sexes. Premièrement, malgré toutes les avancées faites pour améliorer la qualité de vie des femmes depuis le mouvement des suffragettes (droit de vote, droit à l’avortement, etc), il faut toujours rappeler que cette égalité devant la loi qui s’est peu à peu installée entre les hommes et les femmes n’est qu’une égalité sur papier, mais pas une égalité de faits qui est palpable au sein de la société et qui est le véritable objectif des féministes. Ce décalage entre l’égalité en droits et celle de fait est dû à la séparation toujours existante que la société fait entre la sphère privée (famille) et la sphère publique (politique), et il donne lieu à de nombreuses inégalités auxquelles il semble difficile de remédier. D’abord, contrairement à ce que l’on semble vouloir nous faire croire, l’équité salariale est loin d’être atteinte puisque les femmes sont encore nettement plus pauvres que les hommes, surtout si on regarde du côté des familles monoparentales, généralement sous la charge des femmes. Cet écart est principalement dû au fait que les emplois qu’occupent habituellement les femmes (enseignement primaire et secondaire, garderies, infirmières, milieu communautaire, etc.), étant moins valorisés, ils sont aussi moins bien payés que les emplois majoritairement occupés par des hommes. Bien sûr, les femmes ont de plus en plus accès à d’autres emplois, mais le nombre de femmes occupant des postes bien payés ne fait pas le poids devant la majorité féminine sous-payée. Il faut aussi se rappeler que, étant donné leur r e s p o n s a b i l i t é familiale, ce sont souvent les femmes qui sont engagées à temps partiel et, peu importe la discipline, ces emplois sont bien sûr moins bien rémunérés et ne comportent aucun avantage social, contrairement aux emplois à temps plein. Cette différence salariale crée, en plus d’une égalité économique, une certaine hiérarchie à l’intérieur des ménages qui donne lieu à une oppression sur les femmes toujours présentes dans la sphère privée (famille). De plus, on constate des inégalités toujours présentent dans le système d’éducation, inégalités qui ont nécessairement des répercussions sur l’éducation des enfants, sur la vision des femmes et des hommes qui leur est inculquée et sur la place qu’ils ou elles occuperont éventuellement dans la société. L’enseignement primaire et secondaire est majoritairement assuré par des femmes et est considéré comme étant de base, ne menant pas directement à une carrière professionnelle. Il faut aussi spécifier que les professeur-e-s à ce niveau sont clairement moins bien payé-e-s que ceux et celles qui enseignent au cégep ou à l’université. Par contre, l’éducation post-secondaire, directement reliée à l’apprentissage d’un métier, à la formation d’une carrière, est majoritairement dispensée par les hommes. Plus on avance dans les paliers d’étude, plus la proportion qu’occupent les hommes grandit. Aujourd’hui, même si la plupart des étudiants et étudiantes universitaires sont des femmes, leur présence à la maîtrise et au doctorat est moindre, donc leurs chances de devenir professeure en enseignement post-secondaire sont nettement diminuées. De cette façon, l’élite masculine s’assure de conserver sa place dans les sphères de pouvoir économique et politique puisqu’elle domine l’enseignement qui mène à cette élite. La socialisation est un facteur important qui influence les choix de carrière faits par les femmes, malgré le fait que les hautes études et les postes de pouvoir leur semblent accessibles. En effet, étant donné que l’oppression des femmes est toujours présente dans la sphère privée, c’est-à-dire dans la famille, le modèle fournit aux garçons et aux filles, autant au sein du domaine familial qu’au sein du système d’éducation qui reproduit conformément le modèle de la famille, en est un sexiste. Encore aujourd’hui, la manière dont les parents éduquent leur enfants est différente selon le sexe de celui-ci, et cette éducation fait alors en sorte de reproduire l’inégalité qui s’est installée depuis des siècles et qui opprime les femmes : la société patriarcale. Bien sûr, plusieurs femmes réussissent à atteindre les « hautes sphères de pouvoir », mais à quel prix et dans quel objectif ? Le prix à payer pour ces femmes est l’adoption de comportements masculins car, pour atteindre ces sphères masculines, l’attitude à adopter est claire : compétitivité, malhonnêteté, désir de pouvoir, etc. De plus, gravir les échelons de la domination, ce n’est pas ce qu’il y a de plus valorisant. En effet, abolir un système de domination basé sur le sexe pour en reproduire un basé sur la situation économique ne supprimera pas les inégalités présentent dans notre société contre lesquelles les féministes se battent depuis longtemps. C’est pourquoi une analyse anticapitaliste est souvent retrouvée aujourd’hui dans l’élaboration des théories féministes radicales, contrairement aux analyses antérieures des féministes. Cette analyse semble aujourd’hui de plus en plus nécessaire puisque les inégalités sont de plus en plus établies et, bien qu’elles touchent majoritairement les femmes, elles n’épargnent pas les autres couches de la société. Ces inégalités toujours présentent font en sorte qu’il est nécessaire que la situation des femmes soit défendue dans chaque lutte qui est menée pour la fin de l’oppression. Dans les luttes étudiantes que nous menons à tous les jours, il est indispensable de se rappeler qui souffre le plus, par exemple, des hausses de frais de scolarité, des coupures dans l’éducation et dans le programme de prêts et bourses : les femmes. C’est pourquoi les revendications spécifiques pour l’amélioration de la condition des femmes ont toujours leur place au sein des revendications du mouvement étudiant, et c’est aussi pourquoi il faut valoriser l’implication de ces dernières au sein des différentes luttes, car ce sont les premières à subir les effets des mesures anti-sociales adoptées par les gouvernements. Il ne suffit qu’à penser à une des premières décisions anti-sociales prises par le gouvernement Charest depuis son élection le 14 avril dernier, soit la hausse des tarifs en garderies de 5$ à 7$, pour se rappeler qui est principalement touché en ce moment par les mesures néo-libérales de Charest. C’est dans cet esprit, selon moi, que l’ASSÉ adopta, lors de sa formation, des revendications spécifiques pour les femmes et des mesures visant à encourager l’implication de celles-ci au sein de ses structures. Ces fondements de l’ASSÉ ne doivent en aucun cas être oubliés ou négligés, de là le rôle du comité femmes, et le combat pour une véritable égalité entre les sexes doit être rappelée chaque jour par tous les membres.


Une asymétrie derrière les sexes : le GENRE

Avril 2004, VOL 3, NO 3
Comité Femmes

L’égalité entre les deux « sexes » n’est postulée que depuis le siècle dernier. En effet, de la Grèce Antique, où Platon soutenait que le bonheur se trouve dans l’action politique, laquelle était alors inaccessible aux femmes, jusqu’au milieu des années 1900, où l’Église encourageait toujours et fortement une vision binaire inégale du monde, les hommes furent considérés supérieurs aux femmes. Voilà donc quelques générations qui se voient inculquer les valeurs d’une « véritable » égalité entre les deux « sexes ». Ce postulat fondamental, qui à mon avis est certainement légitime, nous laisse toutefois croire en une réalité qui n’est pas. Cette idée prise pour acquis, avec laquelle la plupart d’entre nous avons grandi, nous porte à nier l’asymétrie toujours existante entre les femmes et les hommes. Cette attitude nous amène à adopter des comportements réactionnaires vis-à-vis des individus luttant pour une égalité réelle entre les deux « sexes ». Le féminisme est trop souvent vu comme un mouvement désuet, et son seul nom se voit imposer une connotation péjorative, anti-hommes, alors que la grande majorité des diverses tangentes féministes n’ont aucune intention de détruire un système, soit le patriarcat, pour en reproduire un semblable dans lequel les rôles seraient inversés. Le système patriarcal est une organisation sociale fondée sur le pouvoir exclusif ou prépondérant des hommes, un système socio-économique construit par des hommes pour des hommes ; la participation effective des femmes à la construction du système n’est encore qu’une possibilité latente. La société dans laquelle nous vivons n’est point prête à laisser autant de place aux femmes qu’aux hommes, ni dans la sphère politique, ni sociale/familiale (encore aujourd’hui, « l’homme de la maison » ou « le chef de famille » est une notion bien courante), ni dans la sphère économique. Grands penseurs, leaders politiques, professeurs dans les universités, dirigeants d’entreprises…Avouons-le, les « grandes de ce monde », ça n’existe pas encore ! Ne vous méprenez pas, je parle ici de reconnaissance d’accomplissements, non pas des accomplissements eux-mêmes. Notre société en est une qui favorise les hommes, qui valorise davantage les postes occupés traditionnellement par des hommes, les invite à « assurer », à être en contrôle de la situation, à protéger, à prendre « leur place », à être des hommes ; les femmes, à être féminine, à ne pas parler trop fort, à laisser les hommes venir vers elles, à appuyer leur discours sur leurs confrères…Il est évident que la situation québécoise est préférable à celle de plusieurs pays, mais il reste que nous, femmes et hommes, sommes encore amené-e-s à adopter des comportements « genrés », c’est-à-dire purement conditionnés selon le genre, masculin ou féminin, qui nous est automatiquement attribué d’après notre sexe. (Curieusement, le masculin l’emporte toujours dans la langue française, et on nous dit que c’est une question de fluidité…la question n’est-elle pas plutôt politique ? Le vocabulaire choisi produit nos valeurs, il serait donc pertinent de commencer par là ! Je ne me sens pas incluse quand on me parle d’hommes politiques, d’étudiants, de nous, les Hommes.) Les hommes refusant d’adopter des attitudes machos semblent confrontés à des pressions sociales les invitant à se conformer, et à ces attitudes, et donc à l’hétérosexualité, ou à se voir exclus. C’est dire que même les hommes ont à y gagner dans cette lutte pour une société égalitaire. Pour ce qui est des femmes qui ne sentent pas l’oppression, qui prennent « leur place », il semble qu’elles tendent à adopter des comportements inculqués au genre masculin, que cela soit ou non dans leur nature. Avons-nous vraiment à faire ça ? L’homogénéité sur la base du genre masculin ce n’est pas ça l’égalité ! Qu’est-ce que le genre de toute façon ? Le genre c’est l’ensemble du construit social dans les comportements humains ; c’est la hiérarchie reflétée dans les rôles de sexes, dans les supposés caractères propres aux hommes et aux femmes, laquelle se perpétue depuis trop longtemps. Ce concept implique que l’espèce humaine est divisée en deux, qu’il n’y a donc pas d’espace possible à l’extérieur de ces deux catégories. Après tout, pensons-y, qu’y a-t-il d’inné, de propre aux femmes, aux hommes ? Pas grand chose. Ne devrions-nous pas disposer de la latitude d’être ce que nous sommes, sans la contrainte du genre lié traditionnellement à notre sexe ? Mais on a si peur de perdre cette catégorisation sécurisante du féminin/masculin. Si l’on décide de rompre la perpétuation de l’asymétrie des sexes par le rejet des comportements « genrés », autant chez les hommes que chez les femmes, il n’y a pas lieu de craindre une uniformisation des individus sur le modèle masculin par exemple, lequel n’existerait plus tel qu’on le connaît dans un contexte d’égalité. Le genre, tant qu’à moi, n’est donc qu’un concept exécrable, une représentation propre au monde binaire1. La vision binaire, manichéenne, ou encore dualiste du monde, en est une qui créé nécessairement des inégalités : en séparant toute chose en deux parties, sans nuance, une des deux parties opposées se trouve à servir de référence positive par rapport à l’autre, ce qui n’est qu’un pur jugement de valeur. C’est là que se créent les concepts de bien et de mal, d’excellent et de médiocre, de genre masculin et féminin, d’hétérosexuel et d’homosexuel, de normal et d’anormal, de (sexe) fort et de faible, etc. Ultimement, en divisant les êtres humains en deux groupes opposés avec comme instrument ce concept de « genre » et tous les comportements qu’il dicte, hommes et femmes reproduisent nécessairement une dichotomie asymétrique. Les femmes doivent prendre conscience de la situation encore inégale et prendre la place qui leur revient ; les hommes, se positionnant au pôle privilégié de cette asymétrie, doivent eux aussi prendre conscience de la situation et participer à l’enlisement de l’inégalité entre les « sexes » et ce, en laissant cette place aux femmes nécessaire au rééquilibre des conditions humaines, en délaissant volontairement leurs avantages particuliers, leur rapport de force. Comme ce l’est pour tout groupe privilégié, la prise de conscience suivie d’une réelle volonté de répartition des pouvoirs, des opportunités, de la crédibilité, de la reconnaissance, des richesses, etc. bref de ce que l’on a en trop ou de ce que l’autre a en moins, est chose extrêmement exigeante. Chez les femmes, ne l’oublions pas, la prise de conscience de l’asymétrie hommes/femmes n’est rien de moins qu’une raclée pour l’ego. Autre concept à démolir selon moi mais bon… Une quête d’authenticité, d’égalité, d’épanouissement, de bonheur ; un rejet des comportements modelés par une histoire, une tradition, et une société hiérarchique, voilà ce que c’est !

Sources : [4]


Bilan de la campagne du 8 mars

Avril 2004, VOL 3, NO 3
Blandine Juchs, étudiante au baccalauréat en sociologie à l’UQÀM,

Dans la perspective de stimuler la discussion au sein des associations locales et de renouveler les différents mandats d’une plate-forme proféministe à l’ASSÉ, il avait été voté au dernier Congrés : « Que chaque association étudiante locale tienne une assemblée générale spéciale " femmes " autour de la journée du 8 mars, prenant compte des congés scolaires, et que ces assemblées générales soient précédées ou suivies d’une semaine thématique " femmes ". » « Qu’un comité ad hoc mixte d’organisation des assemblées générales spéciales " femmes " soit formé afin de soutenir les associations locales dans cette démarche, notamment par la production de matériel, la création d’une liste de conférencières sur le féminisme, l’élaboration d’une suggestion d’un ordre du jour et d’une plate-forme de revendication. Qu’à ce comité soient élues des personnes au présent Congrès et au prochain Conseil Interégional (CIR), personnes membres ou non-membres qui sont intéressées et désignées par l’une des deux instances nommées ci-haut. » « Que le comité soit redevable au prochain Congrès et y produise un bilan. » « Que le præsidium des Assemblées Générales Spéciales " femmes " soit assuré par des femmes. » Ainsi durant, les semaines autour du huit mars se sont tenues différentes activités, mais aucune Assemblée Gnérale spéciale femmes. Matane : la semaine précédent le huit mars une soirée de discussion sur le féminisme a été organisé lors du 5 à7 hebdomadaire de l’asso, le film " Rebelles féministes " a été projetté, suivi d’une discussion sur les rapports de sexes dans nos vies comme dans la société en générale. C’était une soirée simple à organiser et une belle expérience à répéter. Sherbrooke :Le lundi de la nourriture biologique et du café équitable auxquels étaient joints des textes sur l’image des femmes ont été distribués. Une lettre contre l’abolition du conseil du statut de la femme a été rédigée et des docments contre les publicités sexistes. Des images ont été placées dans les panneaux publicitaires. Il y a eu un atellier d’une vingtaine de personnes sur la question de la division du travail, sur la définition du patriarcat, et sur la necessité d’une lutte feministe. Le projet de constituer un comité Femmes prend forme…Des debats se sont aussi tenus sur les comportements au sein même de l’asso durant toute la semaine .. Un autre expérience enrichissante... Discutez-en dans vos assos ! UQAM : Une assemblée générale des femmes de l’UQAM à été appellée : employées, chargées de cours, professeures et étudiantes se sont reunies le 10 mars dernier. La première étape était de se rencontrer, se reconnaître mutuellement. Face à l’ampleur de la tâche il a été décidé de poursuivre l’AG sur plusieurs rencontres afin de sortir avec un plan d’action et des revendications communes, concernant notamment les politiques internes de l’UQAM. Féminisation de la matière et introduction d’une percepective féministe dans les cours sont les revendications de base de l’Assemblée. S’il y a eu d’autres événements ou s’il y en a à venir, avertissez-nous.

Les femmes représentaient près des deux tiers des travailleurs au salaire minimum en 2003, au Canada, alors qu’elles constituaient un peu moins de la moitié de l’ensemble des employés. D’après Statistique Canada, une femme sur 20 travaillait au salaire minimum, contre un homme sur 35.

« Le salaire minimum est affaire de femmes » [5]

Le Congrès américain a adopté un projet de loi reconnaissant au foetus une existence juridique, une victoire pour la droite religieuse qui fait craindre aux défenseurs de l’avortement un début de remise en cause de ce droit. [6]

Depuis un an, des vigiles chiites traquent les femmes - de moins en moins nombreuses - qui osent encore se balader sans foulard dans les rues de Bagdad. HACHEY, Isabelle. « Irak : la revanche des barbus » [7]


Un comité femmes, ça sert à quoi

Septembre 2004, VOL 4, NO 1
Émilie Robidas, étudiante au Collège de Sherbrooke

Au début de chaque année l’Association étudiante du Collège de Sherbrooke (AECS) fait la promotion de ses différents comités : femme, mobilisation, journal, écologique, etc. Certains comités étaient déjà actifs, mais le comité Femmes l’était moins depuis quelques années, faute d’organisation et de mobilisation des étudiantes. Ce qui a poussé les femmes à se regrouper et à reformer le comité Femmes est la volonté d’améliorer et de changer la condition des femmes. Nous (elles) vivons des inégalités dès notre plus tendre enfance tel que le genre. Le principal but du comité est donc de conscientiser les femmes et les hommes des effets de notre éducation sociétaire. Nous (elles) avons déjà fixé notre date d’assemblée générale afin d’être pleinement actives, soit le 21 septembre 2004 à 18h00 à l’AECS. Les priorités qui ont été discutées durant la rencontre sont de faire des liens avec d’autres comités Femmes, soit dans des associations étudiantes ou dans des organismes communautaires, de préparer des conférences, de conscientiser et de sensibiliser la population à la condition féminine, surtout en ce qui a trait à l’image des femmes, la pauvreté au niveau des inégalités entre travailleurs et travailleuses, les prêts et bourses, le logement social et les mères monoparentales. Aussi, nous ferons de la conscientisation ainsi que de la mobilisation nationale en vue de la manifestation pro-choix, qui aura lieu le 3 octobre 2004 à Montréal, laquelle dénoncera le fait que les femmes n’ont pas le droit à l’avortement libre et gratuit et qui revendiquera ce droit. Plus tard, dans la semaine du 8 mars 2005, nous (elles) aimerions faire des assemblées générales avec toutes les membres du personnel des collèges et universités, ainsi qu’organiser quelque chose au niveau national, mais c’est pour plus tard. Donc si cela vous intéresse et que vous voulez plus de renseignements, vous pouvez aller dans la section « document » du le site de l’ASSÉ (www.asse-solidarite.qc.ca) ou nous contacter à Sherbrooke au (819) 346-1874


Luttes féministes au sein de l’ASSÉ

Octobre 2004, VOL 4, NO 2
Marie-Michèle Whitlock, étudiante libre à l’UQAM

Au dernier congrès à Sherbrooke un plan d’action a été adopté et plusieurs mandats ont été défini pour intégrer la lutte féministe dans le mouvement étudiant. Mais un accent a été mis sur la tâche de faire de la mobilisation pour combler le comité femme de l’ASSÉ : Que les membres de l’ASSÉ travaillent activement à promouvoir l’implication des femmes dans le comité femmes de l’ASSÉ, avec pour objectif de combler les 3 postes vacants d’ici la fin de la session.

Pourquoi est-il important que l’ASSÉ prenne des positions et des plan d’action pro-féministe ? La lutte féministe doit être intégrée à toutes les luttes sociales. Les femmes sont souvent celles qui se retrouvent au bas de l’échelle sociale. Elles sont les plus endettées par le système des prêts et bourses, elles ont davantage d’emplois précaires, elles sont majoritaires sur l’aide sociale, bref la classe des femmes est la plus pauvre de notre société. Cette classe a besoin de bons services sociaux commel’éducation, la santé et l’assurance-emploi, c’est pourquoi les mouvement sociaux doivent se faire un devoir d’intégrer une perspective féministe à leurs actions, revendications et luttes. L’ASSÉ, qui prône une solidarité avec toutes les luttes sociales, a toujours proclamé l’importance que les étudiants et étudiantes prennent position sur des sujets qui touchent d’autres sphères de la société que l’éducation. Les femmes sont aussi des étudiantes qui ont besoin que leurs droits et intérêts soient défendus. Ainsi il est important que les associations étudiantes fassent connaître les revendications féministes et fassent la promotion de la lutte contre le patriarcat.

Le comité femmes de l’ASSÉ Le comité femmes de l’ASSÉ est élu au congrès et a plus d’importance et de pouvoir que les autres comités. Il possède un droit de proposition et d’appui dans les instances (congrès et conseil interrégional). Cette structure a été adopté à l’ASSÉ pour que les étudiantes soient bien représentées et que les droits soient bien défendus. Le travail que le comité femmes doit accomplir est de produire, en collaboration avec le comité information, du matériel d’information, d’organiser conjointement avec les comités de mobilisation et/ou les conseil régionaux des actions mettant de l’avant les revendications féministes. Pour pouvoir être sur le comité, où trois postes sont présentement ouverts, il faut être une étudiante membre de l’ASSÉ (voir les statuts et règlements sur notre site Internet).

Comment combler les postes et comment construire un comité femmes local ? Il est certain que le comité femmes de l’ASSÉ serait beaucoup plus facile à combler s’il y existait des comité femmes dans toutes les associations étudiantes membres. Malheureusement ce n’est pas encore le cas, car il n’y a présentement que deux membres de l’ASSÉ qui en ont un. Alors faire la promotion du comité femmes national doit passer par une mobilisation locale pour la construction de comités locaux. Les idées originales pour attirer les gens à s’intéresser aux revendications ne manquent pas, mais les principes de base de mobilisation et d’action restent des prémisses incontournables. Pour que des femmes désirent s’impliquer dans des comités femmes, elle doivent se reconnaîtrent dans les revendications et surtout être mobilisées. C’est en organisant des mobilisations et des actions féministes que les étudiantes s’intéresseront aux comités. Donc il est important que les associations locales continuent à faire des activités de mobilisation et des actions proféministes (conférences, actions femmes aux bureaux de prêts et bourses, dénonciation de la publicité sexiste, etc.), même s’il n’existe pas encore de comité femmes, car il ne se construira pas tout seul et tout le monde doit mettre la main à la pâte,y compris les hommes !

Est-ce que tout ce travail apporte des résultats ? L’ASSÉ existe depuis 3 ans et dès sa fondation elle s’est dotée de mesures pour favoriser l’implication des femmes. On peut penser au droit de parole alternance homme-femme, à la politique de féminisation à l’écrit et à l’oral, aux caucus non-mixtes, et on peut déjà remarquer que la représentation des femmes dans les délégations augmente, que des comités femmes commencent à se construire au niveau local, que les plans d’action intègrent de plus en plus une perspective féministe. Si on compare avec les autres organisations étudiantes (FECQ-FEUQ), où aucune mesure n’est établie et où les revendications féministes sont loin d’être écoutées, l’implication des femmes est plus faible, leurs revendications et plan d’action évincent la perspective féministe et ces groupes relèguent au groupe femme tout le travail. Les résultats de ses mesures et de l’intégration de la lutte reste tout de même difficile à évaluer, car c’est un travail à très long terme, mais déjà après quelques années ont peut voir des avancées positives. Il est donc important de persévérer et que les étudiantes continuent à lutter pour faire valoir leurs droits ! Impliquez vous dans le comité femmes de l’ASSÉ et dans vos comités locaux.

Voici quelques-uns des mandats qui ont été adoptés lors du dernier congrès de l’ASSÉ qui a eu lieu les 24 et 25 septembre à Sherbrooke 1. Que les associations locales soient encouragées à mettre un point « femmes » à leurs assemblées générales afin d’actualiser les revendications et préparer un plan d’action avec un suivi ; 2. Que les membres de l’ASSÉ travaillent activement à promouvoir l’implication des femmes dans le comité femmes de l’ASSÉ, avec pour objectif de combler les 3 postes vacants d’ici la fin de la session ; 3. Que l’ASSÉ mène une campagne contre la marchandisation ducorps de la femme, entre autres par la création d’autocollants et d’affiches ; 4. Que dans chaque instance de l’ASSÉ soit préparé un point « femmes » et que les associations locales soient encouragées à faire de même ; 5. Qu’une page « femmes » soit créée sur le site Internet de l’ASSÉ ; 6. Que l’ASSÉ invite les associations locales à mettre sur pied dès cet automne des comités organisateurs d’évènements, de débats et de mobilisation sur l’actualité du féminisme à l’occasion du 8 mars 2005 et que ces comités soient invités à se coordonner ; 7. Que l’exécutif de l’ASSÉ et les associations membres travaillent à élaborer, en vue du prochain congrès régulier de l’ASSÉ, une position envers le congrès masculiniste international prévu pour le printemps 2005 à l’Université du Québec à Montréal ; 8. Que l’exécutif de l’ASSÉ soit mandaté pour envoyer un communiqué de presse en appui aux actions entourant la tenue de la manifestation pro-choix du 3 octobre à Montréal.

Politique de féminisation : À l’écrit, les mots ayant une différence au niveau de lasonorité doivent être féminisés au long et les mots dontla sonorité ne change pas doivent être féminisés à l’aide du trait d’union ( - ) selon les règles de la grammaire française. Exemple : les étudiants et étudiantes touché-e-s par cette mesure. Cette politique est appliquée parce que les femmes doivent aussi exister dans la langue française.


Retour sur le 8 mars

Mars 2005, VOL 4, NO 4
Comité Femmes

Encore une fois cette année le 8 mars, Journée internationale de la femme, a été célébré dans plus de 50 pays, aux quatre coins du globe. Sur tous les continents, des milliers de femmes, mais aussi des hommes, ont défilé pour dénoncer les sévices auxquels celles-ci font face et revendiquer la reconnaissance de leurs droits légitimes. Une première manifestation eut lieu deux jours plus tôt à Istanbul, en Turquie, qui fut violemment réprimée à coups de matraque et de gaz lacrymogène par la police anti-émeute turque. Des femmes et de jeunes gens furent ainsi sévèrement violenté-e-s lors du rassemblement. Cela n’a toutefois pas empêché les femmes de prendre la rue en ce 8 mars 2005. À Sao Paulo, au Brésil, elles furent ainsi 35 000 à manifester lors d’une " longue marche mondiale " destinée à faire connaître une " Charte mondiale des femmes " lancée la journée même et devant arriver le 17 octobre prochain à Ouagadougou, au Burkina Faso, après avoir traversé 53 pays. La marche se déroulait comme une course à relais où le témoin était un document prônant " l’égalité, la liberté, la justice, la paix et la solidarité ". Entre autres choses, la Charte " identifie le patriarcat comme le système d’oppression des femmes et le capitalisme comme le système d’exploitation d’une immense majorité de femmes et d’hommes par une minorité ". D’autres manifestations importantes ont eu lieu en Europe et dans les Amériques. L’Asie ne fut pas en reste non plus avec plusieurs rassemblements. Ce fut notamment le cas du Pakistan, où eut lieu une manifestation rassemblant plusieurs centaines de femmes, menées par Mukthar Mai, qui fut violée collectivement en 2002 parce que sont frère avait eu une relation avec une femme d’une tribu d’un rang social plus élevé. La manifestation demandait la fin des crimes d’honneur et ce, peu de temps après que cinq des accusés eurent été acquittés. Le Bangladesh fut quant à lui témoin d’une manifestation de plus de 5000 hommes qui marchèrent en solidarité avec les femmes et pour en appeler à plus de protection contre les attaques à l’acide, dont on estime qu’elles ont défiguré près de 2000 filles et femmes ces cinq dernières années. Encore une fois, donc, le 8 mars fut une occasion pour les femmes de crier haut et fort que le temps était venu de mettre un terme aux discriminations dont elles sont victimes et en appeler à un monde plus juste et solidaire. Et c’est à cette solidarité prônée par ces femmes du monde entier que les étudiants et étudiantes en grève ont répondu en manifestant eux et elles aussi dans les rues de Montréal.


Femmes au Nicaragua

Mars 2005, VOL 4, NO 4

En Occident, l’accès à la contraception fut incontestablement le point de départ de l’émancipation de la femme. Ces innovations ont permit au sexe féminin de sortir des rôles traditionnels qui lui était confiné pour se développer à part entière en tant qu’individu. Ce gain a permis à celles-ci d’acquérir une indépendance financière considérable par rapport aux hommes, de développer la confiance en soi, de choisir sa vie. Or, cette tendance ne semble malheureusement pas avoir gagné les mentalités des pays d’Amérique centrale, plus particulièrement au Nicaragua. Tout d’abord, les moyens de contraception sont plutôt limités ou bien ils sont disponible dans quelques organismes communautaires, financées par des ONG qui fournisse pilules anticonceptionnelles, condoms et dépoprovera. Malheureusement, la société catholique et patriarcale, dans lequel les Nicaraguayennes sont enfermées, sont les principaux facteurs des grossesses prématurés (fille-mère). En effet, cette situation est dûe principalement à l’absence du père dans les foyers, du manque de communication avec la mère, d’un faible niveau d’éducation scolaire, au peu d’auto-estime… Pas étonnant que les adolescentes affirment que ce qui est le plus important, c’est d’être mère. Donc, il n’est pas étonnant de constater qu’environ 50% des jeunes femmes commencent leur vie sexuelle avant 18 ans. Le drame est l’absence, selon la région, des moyens de contraception, mais d’abord l’interdiction du Vatican de les utiliser. De plus, l’avortement y est également proscrit, bien que la loi nicaraguayenne accepte les avortements thérapeutiques si la vie de la mère est en danger. Mais la morale catholique, très puissante dans ce pays, oblige les femmes à poursuivre des grossesses non désirées et ce, même si la jeune fille n’a que 10 ans et qu’elle a été victime d’inceste par son père ou son frère. À ce propos, une grossesse sur trois est le résultat d’inceste ou de viol au Nicaragua. De plus, en 1998, la loi canonique stipule qu’un avortement non thérapeutique est passible d’excommunion ! Imaginez ! Dans une société patriarcale fondé sur le catholicisme ! C’est une honte ! L’honneur de la famille y est bafoué pour l’éternité ! Il n’est pas surprenant, mais alors plus que révoltant de constater que les jeunes femmes sont souvent expulser du domicile familial. Elles doivent assurer leur survie et celle de leurs enfants sans propriété, sans logement, la plupart du temps seules (quel homme voudrait d’une femme " déviergée ?" Et les Nicaraguayens eux ne se gênent pas pour avoir un vie sexuelle active avant le mariage et avoir DES vies extras conjugales durant leur mariage.) Cette situation expose davantage les femmes à la violence, abus et prostitution… l`enfermant ainsi dans un cercle vicieux.


Les intégrismes à la conquête du Québec

Octobre 2005, VOL 5, NO 2
Martine Poulin, Comité femmes de l’ASSÉ

La mouvance politique occidentale d’aujourd’hui est loin d’être glorieuse et nous sommes en droit de nous demander si nous nous approchons un tant soi peu des glorieuses années 1980 au cours desquelles la droite conservatrice dominait les hautes sphères étatiques tandis que le fluo et les épaulettes dominaient la mode vestimentaire. Vous voulez des noms : G. Bush, W. Schüssel (Autriche), A. Merkel (Allemagne), P. Fortuyn (Pays-Bas jusqu’en 2003), S. Berlusconi (Italie), K. Marcinkiewicz et L. Kaczynski (Pologne, homophobes notoires), Star Académie, etc. Camarades, l’heure est grave : le mauvais goût est à nos portes !

Or le Québec, sous ses dehors progressistes, est un enjeu pour la droite conservatrice. Même si les partis de centre gauche luttent ardemment à grands coups de réformes néo-libérales pour dépasser les conservateurs et conservatrices par la droite, ceux-ci et celles-ci tentent tout de même une percée sur la terre des infidèles. C’est dans cette optique qu’il faut voir le « Congrès Vie et famille 2005 », d’ailleurs baptisé dans l’informel mais sans discrétion de la part des groupes qui l’organisent « congrès pro-vie » : ils aspirent à conquérir le village d’irréductibles que nous sommes.

Ne soyons pas dupes ! Si le titre de « député chevalier suprême des Chevaliers de Colomb » à de quoi nous faire rire, il ne faut toutefois pas se leurrer : ces gens sont puissants et fortunés. En effet, le Congrès vie et famille nous propose une pléiade de conférenciers (23) et conférencières (8) qui font partie des hautes sphères de la société : docteur-e-s, écrivains, hommes d’églises, politiciens, etc. Ces gens ne sont plus des marginaux : ils sont grassement financés par la droite religieuse et prennent de plus en plus de place dans les différentes sphères de la société.

Le discours que ces gens vont tenir à Montréal au mois de novembre prochain tourne autour des thématiques suivantes : opposition à l’avortement, au mariage gai, au divorce, à l’immigration, de l’euthanasie ; promotion de la famille nucléaire traditionnelle, de la femme au foyer, de politiques natalistes, d’idées homophobes et racistes. Bref, un soufflet violent dirigé à l’encontre des valeurs qui nous animent, en direct du sanctuaire des sanctuaires, l’Oratoire St-Joseph.

Mon corps, c’est mon corps… Notons sans surprise qu’une majorité d’hommes vont, encore une fois, discourir de la question du droit à l’avortement, de la libre disposition du corps des femmes et du retour au foyer. Cela n’est pas sans importance et il faut se méfier de la résurgence de ce discours : l’avortement n’est pas un acte légal au Canada, il est simplement décriminalisé. Il suffirait donc de peu pour changer le cours des choses.

Enfin, notons que les politiques natalistes, fruits des hommes et rares femmes au pouvoir (politique et économique) ont des résultats concrets et parfois désastreux sur la vie des femmes. En Occident, certains groupes d’intérêts font la promotion de la natalité pour sauver le pays de la crise démographique, parce qu’il faut faire plus de bébés blancs. Du coup, les cliniques de planning familial ferment un peu partout et les cliniques d’avortement disparaissent. Au même moment, des femmes sont stérilisées contre leur gré dans les pays dits « en voie de développement » pour répondre aux impératifs politico-économiques du moment. Il devient donc nécessaire aujourd’hui de réactualiser la revendication féministe de réappropriation du corps des femmes par les femmes !

Avortons !… leur congrès Pour réagir au Congrès Vie et famille, une coalition ponctuelle de groupes et d’individus a été mise sur pied à Montréal et a pris le nom « Coalition Avortons leur congrès ». Le but de cette coalition est de faire clairement comprendre aux conservateurs et conservatrices qu’ils et elles ne sont pas les bienvenu-e-s au Québec. C’est pourquoi les membres de cette organisation, dont l’ASSÉ fait partie, ont choisi d’organiser une grande manifestation suivie d’un rassemblement festif le samedi 19 novembre 2005. Le but : rassembler le plus de gens possible pour faire comprendre à la droite qu’elle ferait mieux d’appuyer sur le bouton « autodestruction ». Un comité d’accueil est aussi appelé pour le jeudi 17 novembre, toujours dans une atmosphère festive, drôle voire même audacieuse (choquons la droite !). Enfin, la coalition fera relâche le 18 novembre, laissant le vendredi libre à l’imagination de tous et toutes.

Notons que cette coalition a choisi de se réunir sur des bases claires. Les grandes lignes de la plate-forme se résument ainsi : contre les intégrismes, le patriarcat, les rôles sociaux sexués (hétérocentrisme), le racisme, le contrôle religieux ; pour l’autonomie et la liberté face à notre corps, notre sexualité, notre identité sexuelle, notre santé. De plus, les organisatrices et organisateurs ont choisi de ratisser large pour l’événement et invitent tout le monde à participer à la dénonciation de la droite : mouvement étudiant, féministe, gai, lesbienne et queer, travailleurs et travailleuses, familles, etc. Parlez-en à vos ami-e-s : toute l’information, incluant tracts et affiches, est disponible sur le site Internet de la coalition

Ah ! Si Marie, avait connu l’avortement On n’aurait pas, tous ces emmerdements !


L’équitée salariale, une lutte oubliée

Octobre 2005, VOL 5, NO 2
Geneviève Gariépy, membre volontaire AFESH-UQAM

L’équité salariale est encore une fois mise de côté par le gouvernement provincial, le Premier Ministre Jean Charest offre aux employéEs du secteur public 12,6 % sur 6 ans tout en y incluant l’équité salariale. En fait, cette offre signifie, que les emplois traditionnellement féminins vont avoir une augmentation salariale, mais tous les types d’emplois du secteur public aussi. Un simple 4% est alloué pour contrer les discriminations salariales et toutes autres modifications dans les conventions collectives. Donc, il n’y a aucune volonté du gouvernement pour contrer le problème de la division sexuelle du travail.

Ce que semblent oublier les libéraux est que l’équité salariale est un droit acquis pour toutes les femmes. Ce principe fondamental est inscrit dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne qui a été adoptée en 1976. Cette charte mentionne qu’il est interdit d’exercer une discrimination salariale basée sur le sexe. Depuis 1996, il existe une Commission de l’équité salariale qui veille à l’application de ce droit. Pourtant, selon Statistique Canada, en 2001, les hommes gagnaient en moyenne près de 38 000 $ par année et les femmes, 24 700$. Les diplômés universitaires hommes gagnaient en moyenne 72 000$ et les femmes 48 260$. De plus, le salaire horaire des femmes ne correspond qu’à 81% de celui des hommes.

Les luttes syndicales en matière d’équité salariale visent des réajustements salariaux pour les emplois dits traditionnellement féminins. La revendication première des syndicats nationaux est « Un salaire égal pour un travail équivalent entre les emplois à prédominance féminine et les emplois à prédominance masculine ». La réelle bataille sur les discriminations salariales a débuté avec la CSN en 1986. Les luttes sont principalement menées par la voie juridique et par la voie de la négociation. Les divers documents historiques de la CSN relatent l’énorme bataille des militants et surtout des militantes en ce qui concerne la justice salariale.

En 1986, on voit apparaître les premières formes de négociations sur la question de l’équité salariale dans les conventions collectives du secteur public. Ensuite, en 1987 une série des plaintes sur les discriminations salariales de sexe est déposée à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Le 27 mai 1989, c’est la première manifestation en faveur de l’équité salariale, la grande manifestation nationale se déroule à Montréal et des réajustements salariaux sont versés pour quelques emplois féminins. En 1992, une deuxième série de 73 plaintes est déposée au gouvernement et en 1993 d’autres négociations intenses permettent des rajustements salariaux pour d’autres emplois qui n’avaient pas été visés par les réajustements du passé.

L’année 1996 est une date charnière dans les négociations puisque le gouvernement adopte la Loi québécoise sur l’équité salariale et il y création de la Commission de l’équité salariale. En 1997, les employeurs sont obligés de réaliser un programme d’équité salariale. En 1998, le gouvernement recule, il dépose un rapport à la Commission de l’équité salariale afin d’exempter certains employeurs, dont le gouvernement du Québec, s’ils prétendent avoir fait une comparaison entre les emplois féminins et les emplois masculins. Les militants et militantes syndicales s’opposent fermement à cette modification de la loi et 25 000 cartes dénonciatrices sont déposées au Conseil du trésor pour réclamer un vrai programme d’équité salariale. Huit mois plus tard, suite aux moyens de pression, le gouvernement décide de négocier.

En 2001, le front commun CSN, CSQ, FTQ, FIIQ et SFPQ se regroupent pour poursuivre les démarches de la CSN sur l’équité salariale. Le gouvernement et l’intersyndicale s’entent sur un processus qui permettra d’identifier des catégories d’emplois et déterminer leur prédominance sexuelle. En 2002, un énorme travail d’enquêtes terrain s’enclenche auprès de 10 000 personnes, dans plus de 600 catégories d’emplois et dans divers lieux de travail sur tout le territoire québécois. En 2003, c’est la compilation des données et c’est l’arrivée au pouvoir des libéraux. Un millier de manifestantes et de manifestants se rassemblent devant l’Assemblée nationale à Québec pour rappeler l’importance de la question salariale. Certains réajustements salariaux qui étaient attendus depuis 2000 sont faits, mais sans plus. En 2004, c’est une grande victoire juridique pour les femmes, la Cour supérieure du Québec donne raison aux syndicats en ce qui concerne le défilement de certains employeurs à la loi, donc maintenant tous les employeurs devront appliquer la loi. Le front commun désire poursuivre les négociations et tente d’obtenir plus. Cette année, 2005, en vertu de la loi, un comité d’équité salariale regroupant les divers syndicats est mis en place. L’affichage du programme d’équité et de la loi est devenu obligatoire dans les divers milieux de travail. Cela permet aux femmes de se renseigner et de donner des commentaires au comité.

L’histoire des gains en équité salariale démontre bien que les divers gouvernements québécois ne sont pas pressés d’abolir les inégalités salariales et sexuelles. La loi sur l’équité salariale, qui date de 1996, comprend quatre étapes, mais seulement deux étapes ont été réalisées. Le calcul des versements et les modalités de versements ne sont toujours pas élaborés. Les syndicats aussi semblent mettre de côté leur lutte en matière de condition féminine, puisque la contre-offre présentée au gouvernement n’inclut pas de modalités sur l’équité salariale. Ils demandent 13,5 % sur cinq ans et demi en excluant l’équité salariale, mais n’ont rien proposé de concret pour enfin obtenir cette égalité. La bataille syndicale en matière d’équité salariale qui dure depuis 20 ans serait-elle une lutte oubliée ?


Les femmes en lutte

Octobre 2005, VOL 5, NO 2
Marc-André Fortin, étudiant au Cégep de Drummondville

De mémoire d’homme (et de femme), le patriarcat a toujours guidé les sociétés : les hommes ont accédé au pouvoir, ont dominé, détruit et construit des empires, imposé les lois religieuses et maritales. Jadis, par sa force physique et ses attitudes masculines parfois agressives ou discriminatrices, l’homme a subordonné la femme, plus qu’injustement. Les temps ont changé, et la bombe féministe a explosé au vingtième siècle. Les femmes ont obtenu le droit de vote, l’accès aux universités, une relative autonomie légale et financière, et plus encore. Elles ont fait tant de gains qu’aujourd’hui nous croyons, malheureusement à tort, qu’elles sont devenues égales aux hommes, qu’elles jouissent des mêmes privilèges. Peut-être que la comparaison du Québec à d’autres sociétés adoucit l’impact, mais, ici même, les femmes sont encore traitées comme des êtres inférieurs aux hommes.

Sur un premier plan, notre langue s’avère déjà sexiste. On nous apprend dès le primaire que le masculin l’emporte sur le féminin, peu importent les conditions et les contextes. Notre français, codifié par des hommes de lettres, avait pour intention de conserver le régime en place, de réitérer, dans notre parler, la dominance de l’homme. Face à cet outrage, il nous faut réagir en féminisant nos propos oraux et écrits. Serait-ce une perte de temps que de toujours faire suivre le mot « étudiantes » après « étudiants », que de porter attention sur toutes les formes possibles du féminin dès qu’une seule femme est incluse dans un groupe, tout comme c’est le cas pour le masculin ? Il s’agit d’une habitude à adopter qui, bien au-delà de la simple notion de temps, vise l’inclusion complète des femmes dans les débats et dans la société en général.

Sur un deuxième plan, on croit que les femmes possèdent tous les outils pour réussir, que leur condition est identique à celle de l’homme. En effet, elles ne sont pas sans ressources, et font preuve de génie, particulièrement au cégep et à l’université, pour conjuguer travail, famille et études. Mais la femme a beaucoup plus souvent que le mari la charge des enfants ; elle sacrifie ses études au profit de sa famille alors que l’homme est émancipé de cette contrainte à sa vie professionnelle. La femme est accablée, dans la plupart des médias, d’une image superficielle et stéréotypée, de critères de beauté élevés. C’est le retour de la femme-objet, répondant docilement aux pulsions du mâle. Son corps est utilisé pour la vente et la persuasion ; ses attraits physiques deviennent parfois un critère d’embauche. Devant toute cette pression pour atteindre la perfection, la femme se sent démunie. Les femmes et les hommes doivent s’affranchir de ce concept de femme-objet, ne pas l’exiger ou se l’exiger. Bref, ils et elles doivent le rejeter pour assurer la dignité et l’intégrité de toutes et tous.

Sur un troisième plan, les conséquences de l’avortement reviennent inlassablement aux femmes. L’avortement est encore perçu comme un acte démoniaque et immoral. La jeune femme s’est affranchie du poids de sa sexualité sans que l’homme ne reconnaisse cette indépendance. De nos jours, on vilipende vaillamment les jeunes femmes démolies psychologiquement par une grossesse imprévue en soulignant leur irresponsabilité et naïveté. Les garçons, au moins autant responsables du drame, ne se sentent nullement concernés par les problèmes qu’engendre l’avortement. Il ne s’agit pas ici de remettre en question les bienfaits de l’avortement - il est un gain pour tout mouvement féministe, permettant aux femmes de ne pas subir la totalité des contrecoups d’un événement imprévu -, mais bien de se responsabiliser face à cette réalité. (Christine Delphy, Parole de femmes)

Sur un quatrième plan, rappelons-nous que les femmes monoparentales constituent la couche la plus pauvre de la société et que plus de 85 % des victimes d’agression sexuelle sont de sexe féminin (Statistiques Canada). Les femmes touchent, en moyenne, un revenu 65 % inférieur à celui des hommes. De plus, elles sont les principales bénéficiaires des services sociaux joyeusement supprimés en cette époque néo-libérale. Est-il possible, à la lumière de ces constatations, de parler sérieusement d’égalité ?

La situation féminine ne fait que s’aggraver au Québec. Même confrontées à tous ces problèmes, les femmes refusent de s’affirmer féministes, car nous avons une image déshonorante du mouvement. Une féministe n’est pas une tueuse d’hommes, une brûleuse de soutiens-gorge ou une femme manquée : c’est une femme qui revendique l’égalité des sexes. Tout simplement.

Ainsi, la cause féministe est loin d’être gagnée. Les inégalités, bien que camouflées, existent toujours ou sont banalisées. La formation de comités femmes dans les cégeps et universités de la province est donc fondamentale. Ces comités permettent un rappel constant de la situation féminine auprès de la population étudiante et des luttes à engager dans la société en général. Concrètement, le comité femmes peut axer ses actions sur la féminisation des propos dans les différentes instances de l’association étudiante, exercer des pressions sur l’administration pour la féminisation des textes, créer une garderie en milieu scolaire pour les mères aux études, mobiliser et informer la population étudiante sur l’importance de la lutte féministe, etc. Le comité femmes se veut donc défenseur de l’équité et souhaite étendre son influence sur l’ensemble de la société.


Choisir (d’être) la femme objet ET Congrès anti-choix à moitié avorté

Février 2006, VOL 5, NO 3
Comité Femmes

Alors que les femmes ont traditionnellement été exclues des sphères publiques de la société occidentale, le vingtième siècle, témoin de leur arrivée massive dans les médias, pourrait laisser supposer une amélioration. Pourtant, dès que l’on s’attarde un peu à ces images féminines qui nous sont présentées tous les jours, particulièrement par le biais de la publicité, on en vient vite à se demander s’il est réellement question de progrès, d’amélioration. La quantité d’images de femmes qui nous est projetée est-elle synonyme de qualité ? Ces images correspondent-elles à la vision que nous avons des femmes ou sont-elles le reflet de ce que certains et certaines désirent voir ou ont appris à désirer ?

L’utilisation des femmes en tant qu’objets publicitaires n’est pas un phénomène récent. Il est intéressant de faire un bref retour sur ce qui a mené à l’utilisation marchande du corps féminin et surtout de son image stéréotypée, modelée sur la tendance du moment. Au début des années 1920, cette tendance est à la modernisation et à l’uniformisation dans les « arts ménagers », ce qui marquera le début de la construction de la femme-modèle. Cette femme-modèle, à laquelle chacune devrait s’identifier, est blanche et bourgeoise, elle tient sa maison éclatante de propreté grâce à ses nouveaux électroménagers, élève ses enfants sans heurts et attend le retour de son mari-pourvoyeur derrière son maquillage impeccable.

Les années de guerres qui suivront seront quant à elles fertiles en affiches montrant des femmes participant activement à l’effort de guerre, offrant leur force de travail, leur richesse ou « leurs » hommes. Ce type d’affiches qui présente des femmes fortes, sans émotion, où le maquillage et les lave-vaisselle s’effacent, laissant place à la production de masse, sera aussi présent en URSS ainsi que dans les pays sous dictature fasciste et ce, pendant plusieurs années. Après la guerre, la femme-modèle occidentale effectuera un retour en force pour évoluer en intégrant différents courants de pensée, de la pseudo-femme-libérée-tampax au féminisme « glamour », jusqu’à l’image de bombe sexuelle dénudée, épilée, hyper-mince et jamais menstruée, que l’on nous présente aujourd’hui comme la femme-type.

Cette femme, on peut difficilement oublier son influence sur nos vies alors que sa présence se fait sentir jusque dans les toilettes des écoles. Elle sert à vendre un peu n’importe quoi – voitures, bière, soirées dans un bar branché, serviettes sanitaires… – mais surtout une image, celle de la femme parfaite, dont les publicités occupent plus de la moitié de l’espace dans les revues destinées à un public féminin. D’ailleurs, le reste du contenu de ces magazines, parfois diffusés à des millions d’exemplaires, va aussi en ce sens. En lisant des titres comme « Comment l’exciter en 10 mots ou moins », « 267 manières d’avoir l’air torride », voire même « Objectif sexy : 30 jours pour obtenir le corps de rêve », on ne peut que rester perplexe face à une soi-disant révolution sexuelle qui aurait libéré la sexualité féminine de ses contraintes. Au contraire, de nombreuses femmes s’identifient maintenant à la « culture sexe », portant fièrement le logo Playboy et le string-en-évidence ou fréquentant des bars dont l’argument de vente est la clientèle sexy et les soirées chaudes.

Aujourd’hui, bien que l’on s’indigne du manque de liberté qu’ont connu des générations de femmes avant nous, particulièrement en ce qui a trait à leur corps et à leur sexualité, on oublie trop souvent la pression que la publicité, voire les médias en général, nous imposent encore sur ce plan. En effet, les images que l’on nous projette tous les jours sont celles d’hommes et de femmes uniformes et soumis-es à des critère de beauté précis, dont la vie (hétéro)sexuelle et sans soucis transparaît, peu importe le contexte. Cette place immense qui est donnée à la sexualité et à une apparence physique adolescente contribue à construire en chacun et chacune de nous des critères de beauté et de performance parfois complètement décalés. Elle nous mène aussi à envisager hommes et femmes comme des identités masculines et féminines normalisées et strictes, ce qui est loin des diversités que comporte la réalité.

Cette intégration des portraits que nous projettent les médias mène nombre de personnes à dépenser temps et énergie, voire même à sacrifier leur santé, dans la poursuite de ces idéaux sexués. Cela est d’autant plus paradoxal que la publicité, qui se veut un outil de vente pour des produits donnés, n’utilise le corps des femmes que pour séduire les consommatrices et consommateurs, subordonnant complètement ce corps aux produits qu’elle veut mettre en valeur.

Dès lors, il apparaît que la voie dans laquelle nous nous sommes engagé-e-s, en tant qu’occidentales et occidentaux qui donnons de plus en plus de légitimité à la publicité, est plutôt glissante. Comment espérer nous définir en tant qu’individus formant une collectivité plurielle à tous points de vue en s’identifiant à des corps normalisés et anorexiques ? Il importe de critiquer la place grandissante que prend cette publicité dans nos vies pour, éventuellement, diminuer son impact.

C’est en ce sens que l’idée d’une campagne nationale contre la marchandisation du corps des femmes prend forme. Alors que certaines personnes doutent de l’actualité de débats qui animent le mouvement féministe, que d’autres condamnent complètement ce type d’initiatives, il est clair que ce sujet est on ne peut plus actuel. En effet, au-delà de son intérêt évident, il est essentiel de s’y attarder plus longuement, de façon individuelle et collective, en vue de donner une plus grande visibilité à cette question.


Les femmes au travail

Revue 2006-2007

Le discours féministe libéral qui prévaut en Amérique du Nord a longtemps dit qu’une des grandes réalisations de ce mouvement a été la possibilité pour les femmes d’accéder au marché du travail et ainsi de s’affranchir économiquement de leur conjoint. Voilà certes un gain pour de nombreuses femmes, surtout issues de la classe moyenne, dont plusieurs d’entre elles avaient des ambitions de carrière et de meilleure éducation pour elles-mêmes et pour leurs filles.

Toutefois, la réalité est que les femmes ouvrières, souvent immigrantes, ont énormément travaillé depuis le 19ème siècle, depuis le début de l’ère industrielle et même avant, parce que cela était tout simplement une nécessité pour survivre au jour le jour. Ces femmes travaillaient en tant que domestiques, mais aussi dans les usines, dont celles de l’industrie des textiles. Les conditions de travail des femmes laissaient à désirer (celles des hommes aussi, par ailleurs) ; plusieurs luttes seront d’ailleurs menées dans ces secteurs majoritairement composées de femmes – souvent des femmes immigrantes et femmes de couleur – pour des journées de travail plus courtes, des meilleurs salaires, des milieux de travail plus sécuritaires, contre la brutalité des patrons et contremaîtres, et plus encore.

L’accès au marché du travail, soi-disant victoire du féminisme libéral et réformiste au 20ème siècle, augmente le nombre de femmes au travail, mais ne change pas la donne pour plusieurs milliers d’entre elles. Aujourd’hui encore, malgré les gains réels au niveau de l’éducation et du travail issus des luttes menées par divers mouvement sociaux, les conditions de travail des femmes sont toujours peu reluisantes à plusieurs égards.

Les femmes occupent encore majoritairement les postes à temps partiel : 27% des femmes sur le marché du travail occupent un poste à temps partiel, contre 13% chez les hommes. Qui dit temps partiel dit aussi peu ou pas d’avantages sociaux (congés payés de maladie, assurances, etc.), horaires de travail souvent atypiques et précarité. Les femmes sont aussi plus susceptibles d’occuper un emploi dans l’industrie des services (restauration, commerce de détail, etc.), un secteur où le travail est précaire et sous-payé. Plus récemment, la question de l’équité salariale a aussi mis en lumière des inégalités entre des domaines dits « traditionnellement féminins » (santé et éducation par exemple) et ceux dit « traditionnellement masculins ».

Les luttes pour de meilleures conditions de travail et des meilleurs salaires sont donc à continuer, et les femmes devront sans doute y jouer un rôle de premier plan


Mères étudiantes : une entrevue

Revue 2006-2007

Pendant la grève générale de l’hiver 2005, les membres du Mouvement mères étudiantes et ménages étudiants du Québec (MÉMÉQ) ont produit un mémoire visant à dénoncer les situations de pauvreté et de précarité des parents étudiants. Le texte ci-dessous est basé sur une entrevue avec Geneviève Guernier, active auprès du MÉMÉQ pendant la grève, mère étudiante et membre d’un groupe de travail sur la conciliation études-famille. Pour consulter le mémoire produit par le MÉMÉQ, visitez le site internet

On se doute bien que les parents étudiants sont loin d’être parmi les plus riches dans cette société. Pouvez-vous nous donner un portrait général de la situation socioéconomique des parents étudiants ?

Il est d’abord important de préciser qu’il y a de nombreuses disparités entre les parents étudiants. Des filles célibataires, monoparentales, qui étudient au cégep, au bac ou au certificat, qui travaillent au salaire minimum, sont dans une situation beaucoup plus précaire que, par exemple, des parents qui font des retours aux études dans les cycles supérieurs (maîtrise et doctorat) et qui ont soit une carrière qui leur a permis d’amasser plus de sous, des enfants déjà grandis ou un conjoint ou une conjointe avec un revenu qui pourra soutenir la famille pendant les études du ou de la partenaire.

La monoparentalité est certainement un facteur de précarité important chez les parents étudiants. Les très jeunes mères aussi sont plus vulnérables ; souvent, leur réseau social est moins développé et leurs ami-e-s sont porté-e-s vers des activités qui ne cadrent pas vraiment avec la vie d’un parent. L’isolement s’ajoute donc au fait que le salaire de ces mères sera souvent moins bon, qu’elles n’auront pas nécessairement les moyens de se payer une voiture pour faciliter le transport, ou un logement près de l’école, de la garderie. D’un autre côté, les étudiants étrangers et les étudiantes étrangères, qui arrivent tout juste au pays, souffrent aussi d’une absence de réseau social et sont mal informé-e-s des ressources qui leur sont offertes en terme de soutien aux mères et aux familles.

Finalement, on peut dire que la situation est aussi plus difficile pour les mères que pour les pères, sans vouloir non plus négliger les problèmes de ces derniers. D’abord, il y a beaucoup, beaucoup plus de mères monoparentales que de pères monoparentaux. On sait par les statistiques que les familles monoparentales dirigées par une femme sont plus pauvres que les familles d’hommes monoparentaux. Et puis, culturellement, quand on croise dans la rue un homme seul avec des enfants, on est plus porté à l’aider. Tandis que pour une mère seule, on trouve ça normal, on s’attend à ce qu’elle se débrouille seule, « naturellement ».

De nombreux parents étudiants sont bénéficiaires de l’Aide financière aux études. Quelles sont selon vous les principales lacunes de l’Aide financière aux études (AFÉ) en ce qui concerne la situation des mères monoparentales étudiantes et des ménages étudiants ?

On peut résumer simplement les lacunes nombreuses de l’AFÉ dans le fait que pour n’importe qui, les montants attribués ne permettent pas souvent de vivre au-dessus du seuil de la pauvreté. C’est aussi le cas pour les ménages étudiants. Les Prêts et Bourses nous gardent assez systématiquement en dessous de ce seuil de la pauvreté.

On a vu des sondages (informels) sur les parents étudiants dans lesquels les trois quarts des répondants et des répondantes vivent sous le seuil de la pauvreté. On a vu aussi des cas de mères qui ont un revenu inférieur au seuil de la pauvreté établi pour une personne seule, qui est de $10 800. On a vu des cas de parents qui reçoivent moins d’argent que des personnes sans enfant. Ces cas-là incitent certainement à ce qu’on pousse la recherche pour voir ce qui en est réellement de la situation des familles étudiantes.

Sinon, il y a aussi certaines particularités qui s’appliquent plus spécifiquement aux mères et aux familles. Il y le fait que les pensions alimentaires versées par les ex-conjoints (qui sont par ailleurs exemptes d’impôt) soient prises en compte dans le calcul de l’Aide financière, ce qui a pour effet de réduire les bourses. Il y a aussi le fait que c’est très difficile de prendre un congé de maternité quand on est aux études. Certaines universités ont fait des aménagements, surtout à la maîtrise ou au doctorat, mais il n’y a aucune politique globale qui accorde des congés parentaux payés pour les étudiantes et les étudiants.

L’AFÉ n’est pas non plus adaptée aux réalités de la vie urbaine. On reçoit les mêmes montants, peu importe le coût de la vie dans sa région, les déplacements, la disparité des prix des loyers, etc. Et les montants de l’AFÉ ne sont pas non plus indexés au coût de la vie en général.

La dette d’étude pour les parents-étudiants est supérieure à la moyenne. Au cégep, elle est de $5106 pour les étudiants et les étudiantes avec au moins un enfant à charge et de $3660 pour les autres. À l’université, elle est environ 8311$ pour les étudiants et les étudiantes avec un enfant à charge et de 7107$ pour les étudiants et les étudiantes sans enfant. Finalement, au secondaire professionnel, l’endettement des parents est de $2514 contre $2126 pour les non-parents.

De plus, et pour plusieurs raisons, les parents étudiants sont peut-être plus portés à l’endettement que d’autres étudiants et étudiantes. Par exemple, afin d’offrir une certaine qualité de vie à leurs enfants, des parents voudront payer un peu plus cher pour un logement avec une cour, près d’un parc ou dans un certain quartier. Ils et elles voudront peut-être se procurer une voiture, ou des meubles pour le bébé. C’est là que les banques, les marges de crédit et toute la business de l’endettement « privé » embarque, et s’ajoute aux prêts, aux dettes « publiques » contractées auprès du gouvernement.

En bref, l’AFÉ fait partie d’une série de politiques peu empathiques mises en place par le gouvernement actuel et par les gouvernements précédents. Ces politiques ne sont pas seulement limitées à l’AFÉ. Il y a aussi toute la question du manque criant de logements sociaux, de résidences abordables pour les familles étudiantes, de résidences pour les étudiants et les étudiantes défavorisé-e-s, de l’augmentation du coût des garderies, etc. On a besoin de solutions qui tiennent réellement compte des besoins des mères étudiantes et des ménages étudiants.

Comment se vit la conciliation travail-études-famille-etc ? Y a-t-il une flexibilité au niveau académique pour les parents étudiants ?

La conciliation de ces multiples responsabilités demande évidemment une gestion du temps extrêmement serrée. Nous avons l’impression que notre temps ne nous appartient plus : il est réparti entre les multiples échéances de l’école, du travail, des horaires de garderie peu adaptés à la réalité étudiante (les garderies exigent en plus des pénalités de retard énorme, par exemple $10 par tranche de 10 minutes de retard), et plus encore.

Le fait que l’AFÉ ne permette pas de subvenir adéquatement aux besoins de soi-même et de ses enfants oblige plusieurs parents à travailler en plus de l’école. Là encore, c’est un fardeau de plus.

Quelles ont été les luttes récentes pour la reconnaissance des droits des mères étudiantes et des ménages étudiants ?

Différents groupes de travail, notamment à l’UQÀM, sont actifs autour de cette question. Des groupes de recherche et des collectifs de parents étudiants bougent aussi dans d’autres institutions. On commence à percevoir un peu plus d’ouverture au niveau de l’administration. Par contre, dans le cadre de l’enquête du groupe de travail sur la conciliation à l’UQÀM, nous nous sommes rendus compte que malgré la bonne volonté de certaines personnes, l’administration entreprend certains projets parce que c’est un moyen de promotion pour l’université. Ainsi, des universités vont offrir des services de garde, mais la priorité sera accordée au corps professoral et aux employé-e-s. Les universités offrent des services aux familles, mais pas à celles qu’on pense, c’est-à-dire les ménages étudiants qui en ont véritablement besoin. Le mouvement se trouve en quelque sorte frustré de victoires potentielles et malgré lui un peu complice de la dynamique de compétition entre institutions scolaires.

Pour conclure, quels sont les liens à établir entre mères étudiantes, féminisme et syndicalisme de combat ? Le MÉMÉQ est un mouvement qui part du bas, suivant l’initiative des étudiantes les plus amochées, les plus fatiguées, tannées d’être en position constante de compromis avec elles-mêmes, et déterminées à agir même si c’est moins pour leur propre bien-être que pour celui des familles étudiantes à venir, puisque comme dans toutes les luttes étudiantes, on ne bénéficie pas souvent des avancées auxquelles on a contribué. Et c’est clairement un mouvement féministe par ses revendications égalitaires et humanitaires. Les gens semblent oublier que le mouvement féministe est à l’origine des revendications pour l’équité salariale, les services de prévention des agressions sexuelles, etc. Dans la mémoire collective, il reste plus que des repoussoirs, comme ces vieux mythes ridicules de femmes qui auraient brûlé leur soutien-gorge. Il faut mettre en lumière la quantité de changements positifs pour toutes et tous qui sont survenus grâce au travail persistant et résolu des militantes féministes.


Mères aux études:la pension alimentaire, synonymes de leur surendettement

Nov. 2006, VOL 6, NO 1
Sandra Bérubé, étudiante à l’UQAM

La situation globale des femmes en éducation, suite à de longues luttes, permet à présent aux femmes l’accès au savoir auparavant exclusif aux hommes. Si elles sont à présent égales ou majoritaires aux hommes dans tous les niveaux de scolarisation, excepté le doctorat, elles restent pourtant en position économique moyenne systématiquement inférieure à celle des hommes. Ce clivage ne se limite pas au marché du travail, où elles ne gagnent toujours que 65 % du salaire moyen des hommes. En effet, surreprésentées dans le régime de l’aide financière aux études (AFE), lui-même particulièrement désavantageant pour les parents recevant une pension alimentaire, les femmes sont les plus endettées du système scolaire.

Sur le marché du travail

Sur le marché du travail, elles récoltent des salaires moindres que ceux des hommes, et ce, systématiquement, même à degré de scolarité et horaires égaux. Elles ont davantage de difficulté à s’insérer sur le marché du travail et leur portrait réel sur le marché de l’emploi est peu reluisant. Elles constituent une très large part des personnes travaillant à temps partiel, pour cause principale d’obligation parentale, contrairement aux motifs du peu d’hommes dans la même situation. Aussi, elles sont majoritairement présentes dans des métiers typiquement féminins et moins bien rémunérés, et sont très minoritaires dans les postes de gestion. En outre, c’est encore à elles qu’incombe la responsabilité morale et physique de la famille, rôle auquel elles choisissent souvent de privilégier à leur carrière ou leurs études. C’est d’ailleurs ces dernières qui sont le plus souvent responsables de familles monoparentales, ce qui implique dans bien des cas des difficultés monétaires encore plus importantes.1

Aux études

Conséquemment à des moyens financiers inférieurs à ceux des hommes, les femmes sont plus nombreuses que ces derniers à avoir recours au programme d’AFÉ. De manière générale, en 2003, 29,9 % de la population étudiante a bénéficié du programme. De ce groupe, les femmes ont été presque 20 % plus nombreuses que les hommes à être prestataires (58.7 % comparativement à 41.3 %).2 Les femmes se retrouvent donc, en finale, plus endettées alors qu’elles ont en parallèle moins de gains monétaires. Cette tendance s’observe peu importe leur situation familiale, mais le clivage hommes/femmes est encore plus important chez les femmes séparées, divorcées et mères.3

Le secteur des parents bénéficiaires de l’AFÉ, représentant un nombre de 20 964 personnes, est lui aussi très largement composé de femmes. Elles en composent les effectifs à 71,4 %.4 Les mères monoparentales, déjà pour leur part parmi les plus touchées par l’endettement étudiant, ont vu leur situation s’aggraver encore suite à la dernière réforme de l’AFÉ. Dans le contexte précédent la réforme, la pension alimentaire était déjà calculée dans les revenus des personnes faisant une demande de prêts et bourses. C’était alors déjà très contestable d’utiliser ce montant versé aux enfants comme revenu pour la personne, et encore plus particulièrement lorsque l’on sait que les pensions sont versées de façon intermittente et partielle, ou même jamais, pour près de 30 % des enfants dont le soutien financier fait l’objet d’une ordonnance de la cour.5 De plus, en 1997, les pensions alimentaires pour enfants déterminées dans des jugements ont été défiscalisées. Ceci signifie qu’elles n’ont plus à être déclarées comme un revenu, en regard de l’impôt. Toutefois, elles ont continué à être considérées comme un revenu pour l’AFÉ.

Cette mesure très pénalisante réussissait heureusement à être contournée par plusieurs mères monoparentales - puisqu’il s’agit de femmes en majorité - lorsque celles-ci se tournaient vers le comité de dérogation de l’aide financière aux études. Ce comité suggérait au ministre de leur remettre l’équivalent de leurs chèques de pension alimentaire en prêts et bourses, avis qui était, de manière générale, appliqué. Plusieurs responsables de l’AFÉ dans des institutions collégiales parlent en fait d’une dérogation systématique.

Dans la lancée de la réforme, le ministre de l’Éducation, Pierre Reid, a décidé d’exempter les premiers 1 200 $ de pension alimentaire du calcul du revenu des prestataires. L’entente à rabais suite à la grève générale illimitée des étudiants et des étudiantes n’aura pas empêché la règle des 1 200 $ de continuer de s’appliquer. Cette mesure qui pouvait de prime abord sembler alléger la problématique du calcul de la pension alimentaire dans les revenus, quoiqu’étant déjà par sa simple existence illégitime, s’est avérée encore plus restrictive qu’auparavant. De prime abord, en 2004 et 2005, ce changement n’a pas été trop fortement ressenti puisqu’un nouveau système informatique a permis une bonification de l’aide à ce moment-là, le calcul des montants accordés ayant eu une couverture de 16 mois. Les répercussions se font à présent sentir, alors qu’au même moment, des mères étudiantes pouvant compter sur le revenu de leur conjoint reçoivent plus que les mères monoparentales. Ceci s’explique par le fait que le comité de dérogation a, suite à la réforme, changé son fusil d’épaule et refuse à présent systématiquement de remettre aux mères monoparentales l’équivalent de leur pension alimentaire. Malgré les demandes de dérogation à répétition dans certains dossiers, on se bute à une intransigeance incontournable. Dans bien des cas, il serait plus avantageux pour les mères d’être sur l’aide sociale...6

L’abolition de la prise en compte de la pension alimentaire versée au chef-fe-s de familles monoparentale dans le calcul des montants de l’aide financière aux études est une des revendications de l’ASSÉ. La réforme ayant mené à l’aggravation des conditions entourant les pensions alimentaires étant encore très récente et ses répercussions encore nouvelles, c’est un temps propice pour recueillir les témoignages de la population étudiante et dénoncer ce règlement de l’AFÉ entretenant la misère et le surendettement des mères étudiantes, déjà désavantagées et peu soutenues dans leurs difficultés. En outre, il est plausible de croire un gain réel dans l’abolition du calcul des pensions alimentaires : le gouvernement ayant récemment ouvert la porte à des modifications, la construction d’un rapport de force pourrait certainement obtenir une nouvelle modification, cette fois ci dans le but d’enrayer cette contrainte à l’accessibilité aux études spécifiquement dirigée envers les femmes assumant la monoparentalité et les études de front.

Sources :  [8]


L’équité salarial : plus qu’un salaire égal pour un travail égal

Janvier 2007

L’équité salariale est un dossier ouvert depuis maintenant 30 ans au Québec. Elle fut une lutte constante chez les féministes des années 1970. En novembre dernier, le gouvernement libéral de Jean Charest annonce qu’il appliquera la fameuse loi 35 sur l’équité salariale au printemps 2007. Cette mesure touchera pas moins de 360 000 travailleuses des secteurs public et parapublics qui se partageront une rondelette somme de 1,7 milliard de dollars.

La Loi sur l’équité salariale, adoptée en 1996, va en effet au-delà du simple principe du "salaire égal pour un travail égal". La Loi québécoise sur l’équité salariale est révolutionnaire "parce qu’elle reconnaît, d’un point de vue financier, la valeur du travail des femmes", dit Nathalie Goulet, directrice du Conseil d’intervention pour l’accès des femmes au travail (CIAFT). En vertu de la loi 35, la secrétaire d’une entreprise doit être rémunérée comme son collègue soudeur. C’est dire que l’application de cette loi exige une modification profonde des mentalités concernant le rôle et le travail des femmes dans la société et surtout revaloriser le travail des femmes. En effet, la sous-rémunération des femmes était due, semble-t-il, au fait que les femmes occupent des emplois peu complexes, peu exigeants et demandant des compétences innées aux femmes. Par exemple, l’écoute, la dextérité et la patience sont considérées comme des aptitudes « innées » aux femmes et sont nécessaires à des emplois en relations humaines, comme celui de préposée aux bénéficiaires ou de secrétaire. En fait, 70% des femmes qui travaillent occupent un emploi relié à l’éducation, aux soins de santé et au travail de bureau. Donc, puisque ces compétences sont supposément innées il n’est pas nécessaire de les rémunérer à leur juste valeur.

Aussi, les femmes exercent leurs compétences « innées » dans le cadre d’un travail rémunéré, elles devront faire des tâches qui exigent ces même aptitudes : s’occuper des enfants, faire le ménage et la cuisine, des travaux domestique qui sont non rémunérés et qui vont supposément de soi pour une femme.

De plus, le stéréotype affirmant que le salaire des femmes est le salaire d’appoint de la famille n’aide pas la situation. D’ailleurs, en 2001, les femmes sont à 81% chef de famille monoparentale. Le salaire des femmes est le premier revenu de ce type de famille. Il ne faut pas oublier que ces foyers vivent en grande partie sous le seuil de la pauvreté, leur revenu étant insuffisants pour faire vivre leur famille. D’ailleurs, 46% des femmes âgées de moins de 25 ans gagnent moins de 15 000$ par année. De plus, le revenu moyen des femmes en 2002 se situait à 19 599$ comparativement à 27 780$ pour les hommes.

En fait, c’est précisément là où le bât blesse concernant la loi sur l’équité salariale. C’est que les femmes occupant des emplois précaire dans les secteurs de la vente, du service et de l’hôtellerie ne sont pas touchées par ce règlement. De même que celles qui ne sont pas syndiquée et celles qui sont employées dans des entreprises ayant moins de 10 employés. "Cela représente 25% des travailleuses", déplore Nathalie Goulet, du CIAFT.

Bref, l’application de l’équité salariale constitue un gain important pour les femmes des secteurs publics et parapublics, où elles représentent la grande majorité du personnel. L’équité salariale est donc une reconnaissance des compétences dites innées des femmes et de la valeur de ces emplois. Or, à l’opposé, beaucoup de femmes qui occupent des emplois dans les secteurs les plus précaires de la société ne profiteront pas de la loi 35, bien qu’elles vivent souvent en situation de pauvreté. Finalement, il est intéressant de constater que le message du gouvernement en matière d’équité salariale est hautement contradictoire : D’un côté, il applique la loi sur l’équité salariale et de l’autre, il coupe dans les programmes sociaux afin de "dégraisser" l’État, ce qui affecte directement les secteurs publics et parapublics où les femmes constituent la majorité de salarié-e-s.


Pour une meilleure conciliation étude-famille

Septembre 2007
Geneviève Simon et Justine Rouse-L.

Encore aujourd’hui, la majorité des familles monoparentales sont dirigées par une femme. Ces femmes assument, en plus d’un travail, le rôle de deux parents à la fois. Pour ce qui est des femmes monoparentales aux études, la situation se complique, d’autant plus qu’elles doivent conjuguer travail, famille, cours et temps d’étude.

Dans un esprit d’analyse critique féministe, l’ASSÉ s’est penchée sur la situation précaire que vivent les parents aux études, majoritairement des femmes. Elle s’est positionnée, au congrès d’automne 2006, pour la promotion, l’accessibilité et la flexibilité d’un système de garde dans les institutions d’éducation post-secondaire, incluant des horaires de garderie adaptés aux horaires de cours dans le but d’assurer une conciliation étude-famille.

Les Centres de la Petite Enfance (CPE) constituent un réseau décentralisé, mais public tout de même, dont les horaires varient d’un lieu à l’autre. Cependant, la majorité des CPE ont des horaires très peu flexibles, tout comme les autres services de garde privés. Il y a des systèmes de garde en milieu familial qui existent depuis plusieurs années, mais en raison des coupures massives du gouvernement québécois, ceux-ci sont maintenant centralisés et plus au moins fonctionnels. C’est-à-dire que la gestion de ce gardiennage en milieu familial se fait par une « entreprise » qui peut représenter jusqu’à 450 foyers. Une grande majorité des étudiantes et des étudiants qui y ont recours y sont forcé-e-s, car elles et ils ont soit des cours, soit un travail de soir. De surcroît, il est presque inévitable pour ces personnes d’utiliser ces services en milieu familial, car il n’y a tout simplement pas de place dans les CPE. Certains Centres de la Petite Enfance ont plus de 1000 noms sur leurs listes d’attente. Il est important de noter que le nombre d’enfants permis varie fréquemment entre 40 et 70 par institution. La moyenne d’attente pour obtenir une place est de 2 ans, mais celle-ci peut s’étaler sur une période allant jusqu’à 5 ans ! L’ironie dans cette situation, c’est que les CPE ne prennent plus d’enfants à l’âge de 5 ans, car le petit ou la petite est désormais assez âgé-e pour entrer à la maternelle.

Ces coupures gouvernementales affectent non seulement le fonctionnement des garderies, mais aussi l’admission des enfants à temps partiel, considérés moins rentables. Elles influent aussi sur la rigidité des horaires des services de garde. Ceux-ci ouvrent généralement de 7h30 à 17h30, ce qui peut empêcher les parents de voir leurs enfants pour une bonne partie de la journée (la loi sur les CPE déclarant qu’un enfant inscrit à temps plein doit passer un minimum de quatre heures en centre par jour). Ensuite, très peu de CPE ou de garderies offrent des services de garde de soir et/ou de nuit et à temps partiel, services très en demande par les parents aux études ayant des horaires de vie atypiques. Selon la Presse, « ces horaires sont rares en CPE. Sur les quelques 200 000 places offertes, 10 enfants fréquentent un service de garde de nuit, 406 la fin de semaine, 430 en programmes de demi-journée et 14 600 à temps partiel. » Finalement, un parent aux études est obligé, afin de conserver sa place en garderie ou en CPE, de la payer à l’année longue, peu importe si le ou les parents ont la possibilité de s’occuper de leur(s) enfant(s) durant la période estivale. Les CPE font donc payer les parents, sans offrir le service, sous la menace de perdre la place si jamais elles ou ils ne payent pas. Évidemement, c’est encore une fois le manque criant de places, ainsi que les coupures massives dans le système de service de garde qui incitent ces institutions à agir de la sorte. Ces deux mois à payer la garde d’un enfant, alors que le besoin n’y est pas toujours, ajoute encore une fois au fardeau financier des parents aux études.

Il n’en reste pas moins que lorsque l’on parle de précarité dans les familles, les parents aux études vivent parmi les situations les plus difficiles. Si la gratuité scolaire était chose acquise au Québec, le fardeau financier des parents serait allégé à la fois du coût de leur éducation, mais également de celle de leurs enfants. Pourtant, le gouvernement agit de façon inverse en retirant le montant provenant du régime d’assurance parentale que reçoivent les parents aux études du calcul de leurs prêts et bourses, celui-ci étant considéré comme un revenu.

Comme si des couches équivalaient à un cours de philo…




[1] GOLDMAN, Annie, Les Combats des femmes, Casterman, Italie, 1998[les ménagères->www.multimania.com/les menageres/femmes.htm

[2] Le guide de désobéissance civile, page 5-6, année,éditeur

[3] Zone Rouge/Blood Sisters, zonerouge@bloodsisters.org Tel. : (514) 273-3933 ÉCO LOGIQUE INC. (groupe de femmes spécialisées en produits menstruels environnementaux) Tel. : 1-800-680-9739

[4] Ces idées sont développées de manière fort pertinente par les auteures suivantes : Navarro Swain, Tanya. « Au delà du binaire : les queers et l’éclatement du genre” et Delphy, Christine. « Penser le genre : quels problèmes ? »

[5] Le Devoir, samedi 27 mars 2004, p. C7

[6] SANTINI, Jean-Louis. Le Devoir, samedi 27 mars 2004, p. A9

[7] La Presse,dimanche 28 mars 2004, p.1

[8] Statistique Canada, Femmes au Canada : une mise à jour sur le chapitre du travail, 2003. 2. Aide financière aux études - Statistiques, Rapport 2002-2003, http://www.afe.gouv.qc.ca/connaitre/pdf/stats2003.pdf 3. Aide financière aux études - Rapport annuel 2004-2005 - La gestion par résultat, http://www.afe.gouv.qc.ca/connaitre/pdf/rapportGestion2004_2005.pdf 4. Mères étudiantes et ménages étudiants du Québec (MÉMEQ), Revendications sur la situation des mères étudiantes et des ménages étudiants du Québec, 2005. 5. Rapport de recherche - Quand les parents se séparent : nouveaux résultats de l’Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes, http://www.canadajustice.ca/fr/ps/pad/reports/2004-FCY-6/chap4.html 6. Annie Morin, Changement au régime des prêts et bourses - L’argent des enfants pour payer les études de maman, Le Soleil, 9 novembre 2005.